UN MAUDIT FRANCAIS AU QUEBEC

MONTREAL

LE PARC OLYMPIQUE :

Je me réveille en même temps que MEG, ainsi que je l’ai décidé pour cette dernière semaine. J’avais même demandé à MEG de me réveiller au cas où j’aurais dormi encore à son départ. MEG part travailler, un travail qui, par ailleurs, me privera d’elle durant presque toute la semaine. En effet, elle ne rentrera que vers vingt-deux heures tous les soirs, sauf le vendredi, et sera même amenée à travailler le samedi matin, à sa grande déception, et à la mienne également.

Je me lève donc, prêt à me retrouver complètement seul, plongé au cœur de la deuxième plus grande métropole francophone du monde, après Paris, avec plus de trois millions cinq cent mille habitants. Heureusement, Montréal est une ville facile à vivre, où tout est offert aux touristes pour qu’ils y circulent aisément et tranquillement. Le métro n’y est vraiment pas cher, à peu près cinquante francs par semaine, pour des trajets illimités en bus et métro. Je feuillette mon guide et j’organise plus ou moins mon itinéraire pour les trois jours à venir. Puis, je me jette dans la vile comme on plonge dans la mer, je m’y immerge complètement cherchant à percer le maximum de ses secrets.

Je marche jusqu’à la station de métro la plus proche. J’y achète ma carte hebdomadaire et j’emprunte le tronçon de ligne qui va bientôt me devenir si familier : Fabre - Jean Talon – Laurier – Beaubien – Rosemont – Mont Royal – Sherbrooke – Berry UQAM. De cette dernière station, je me dirige vers le parc olympique, théâtre des JO de 1976, point de passage obligé, qui va occuper grandement ma journée. Je débouche au pied du stade olympique, je me rends au Biodôme et j’achète un Pass qui me donne accès à toutes les attractions.

Ma première visite est, bien évidemment, pour le Biodôme. Le Biodôme est une espèce d’immense réserve naturelle qui occupe l’emplacement de l’ancien vélodrome olympique. Sous la bulle de verre, sont reconstitués divers écosystèmes, présentant un panorama succinct des climats de la planète. On retrouve ici la forêt tropicale, les banquises arctiques et antarctiques, ainsi que, bien sûr, la forêt laurentienne du Québec et la vie du Saint-Laurent. Les climats sont parfaitement reconstitués, passé les portes du sas, on change brutalement de monde. La forêt tropicale, et sa moiteur, me replonge brusquement douze ans en arrière, lors de mon séjour aux Antilles. Les animaux sont en semi-liberté et des oiseaux passent ainsi au-dessus de moi. Ce sont des perroquets rares, les plus grands du monde, des aras hyacinthes d’Amérique du Sud. Plus loin, après avoir cheminé entre les arbres et les aquariums de poissons tropicaux, je découvre un caïman dissimulé à fleur d’eau. Il me faut de longues secondes, et un œil bien aiguisé, pour le repérer. Il reste immobile, guettant sa proie, et sa couleur sombre est un parfait camouflage. J’en oublie que je suis au Québec, l’illusion est parfaite.

Je passe alors dans une autre salle, et je retrouve le Québec. J’arrive au cœur de la forêt laurentienne : La reconstitution est fantastique ! Il y a même un barrage, construit par les castors, sur la petite rivière. La végétation est belle, c’est normal nous sommes en automne. Les animaux semblent y évoluer en toute tranquillité. Deux lynx passent tout près, ils sont très beaux. Ce sont deux chats géants à la grâce toute féline. Plus loin, un porc-épic dort en boule, ses piquants pointés vers les agresseurs humains que nous sommes. Devant lui, des loutres batifolent gaiement. Seuls les castors manquent à l’appel : L’un d’eux dort dans leur hutte, filmé par une caméra vidéo qui nous permet de l’apercevoir. L’étape suivante me conduit sur, puis sous, le Saint-Laurent. Des bans entiers de poissons, morues, bars, et autres, nagent devant moi. Un plongeur les rejoint pour nettoyer l’aquarium géant. Je vois aussi les pattes des canards qui se promènent à la surface. Je vais leur rendre visite en débouchant sur la rive artificielle qui sent la marée, qui sent l'iode et la vie marine. Et, en effet, dans l’eau peu profonde et claire, je distingue, entre autres, des oursins et des anémones de mer. Des dizaines d’oiseaux nichent sur les rochers et volent un peu partout. L’odeur est agréable, l’air est doux, je m’attarde quelque peu pour respirer cet air que j’aime tant.

Le dernier des écosystèmes est celui concernant les deux pôles. D’un côté le pôle Nord et les pingouins, de l’autre le Sud et les manchots. Je m’amuse toujours à les voir se déplacer avec leurs allures gauches. Mais, quelles merveilles d’hydrodynamiques lorsqu’ils se retrouvent en plongée. Heureusement que des vitres nous séparent de ces drôles d’oiseaux, il doit faire sacrément froid de l’autre côté. Je ne suis pas frileux, mais il y a des limites…

Je quitte à regret ce paradis écologique, j’ai encore tellement de choses à voir et à faire dans ma journée. Je ne sais pas par quoi commencer, j’hésite, puis je me décide à faire tout d’abord le tour, à pied, du stade olympique. Je trouve son architecture particulièrement réussie, même si, par endroits, le temps a laissé son empreinte. Je sais que je vais bientôt avoir une vue générale du stade lorsque je vais monter tout en haut de la tour du stade, la plus haute tour inclinée du monde. Je finis le tour du stade et arrive au téléphérique qui doit m’amener au sommet. Je m’embarque dans la cabine et l’ascension commence. Au fur et à mesure, Montréal se dévoile. La ville est un peu plus petite que je ne croyais. Partout où je peux regarder, une montagne barre l’horizon, la nature est toujours très proche. Montréal est une fort belle ville, la tour vitrée au sommet de laquelle je viens de parvenir m’offre une vision impressionnante de la cité de Jacques Cartier. Face à moi s’étend le centre ville, hérissé de gratte-ciel, un centre ville assez compact qui s’adosse au Mont-Royal, l’un des innombrables oasis de verdure de la capitale économique du Québec. A droite du Mont-Royal se dresse l’oratoire Saint-Joseph et sa grande basilique. Les églises sont légion au Québec, et à Montréal tout autant. Où que l’on regarde, on voit un clocher, symbole de l’attachement des québécois à la religion. Et, même si ce sentiment s’estompe de nos jours, c’est véritablement l’un des éléments majeurs de la cohésion du peuple québécois. Sur la gauche, le Saint-Laurent s’écoule. Ce Saint-Laurent qui entoure Montréal, car Montréal est une île, et oui ! Au centre ville, je distingue la tour IBM, l’une des plus grandes. C’est celle où travail MEG, je crois. Je lui envoie un petit bonjour, mais, je ne pense pas qu’elle me voit…

Je dois redescendre : L’heure tourne et je commence à avoir une petite faim. Il est déjà douze heures trente, je suis parti depuis plus de deux heures. Ce n’est que le début des quatre journées marathons que je vais enchaîner. Je ne sais pas où manger, mais, après tout, je peux bien me restaurer au jardin botanique tout proche. Je m’y rends donc, en traversant le verdoyant parc qui passe sous la route. Je parviens vite au jardin botanique, du côté de l’insectarium. Je déconseille à ceux qui ont peur des araignées, et des autres petites bestioles, de mettre les pieds là-dedans. Partout ce ne sont qu’insectes de toutes races et de toutes tailles : De quelques millimètres à une quarantaine de centimètres. On y trouve aussi nombre d’activités et d’animations destinées à mieux faire connaître le monde des insectes. C’est très intéressant mais, peut-être, un peu lourd à digérer. Je trouve qu’il y a beaucoup d’informations dans un petit espace. J’y apprends beaucoup de choses mais je ressors de là l’esprit un peu saturé. J’ai besoin de calme… et de nourriture aussi. Le restaurant est à l’autre bout du jardin. Je me mets donc à me promener au gré des allées, en évitant soigneusement la foule des touristes. Et je découvre un monde merveilleux ! Je suis en plein milieu de la ville et, pourtant, je suis dans un véritable havre de paix. Charles Trenet a du s’en inspirer pour écrire le « jardin extraordinaire ». Les couleurs sont splendides, le seul bruit audible est celui du vent qui fait délicatement bruire les feuillages fournis de la centaine d’arbres et d’arbustes autour de moi. Que dis-je la centaine… les centaines plutôt. Je suis seul et j’ai du mal à savoir encore où je suis. La seule chose dont je suis sûr, c’est que je suis bien. Dans un petit square, une jeune fille est installée. Elle est avec sa planche à dessin. Elle s’applique à restituer l’atmosphère particulière de l’endroit, sur sa feuille. Je passe doucement pour ne pas la déranger, pour ne pas troubler l’harmonie du décor. Je crois qu’elle ne m’a même pas vu. J’arrive, tout à coup, au cœur de la roseraie. Des milliers de roses multicolores s’offrent à moi. Quelle odeur inoubliable, quelles odeurs sublimes ! Dans un moment comme celui là, me viens la vocation d’être jardinier. C’est autre chose que de respirer les effluves des raffineries et des pots d’échappement. Une vague de plaisir m’emporte sur les rives du bonheur. Je me fais discret, me sentant comme un intrus dans ce monde idéal. Quelques pas plus loin, je me retrouve dans la civilisation. Le restaurant est là, entouré d’un océan de verdure. Mon estomac se réjouit et me pousse sans ménagement à l’intérieur. Il est quatorze heures, et cela fait quatre heures que je marche : Je me sens un petit peu fatigué. Surtout que je n’ai pas encore totalement récupéré de mon périple trans-québécois. Je mange donc et je repars à travers le jardin. A chacun de mes pas apparaît un écureuil qui me regarde passer avec indifférence. Autour des mares, les canards et les oiseaux sont les maîtres des lieux. Si je n’entendais pas au loin le bruit des voitures, je me croirais perdu dans la campagne. Si j’habitais Montréal, je sais que je viendrai souvent ici pour me ressourcer. L’après-midi s’écoule et mes jambes sont de plus en plus lourdes. La station de métro est encore loin. Je quitte donc ce royaume végétal pour me replonger au milieu des automobiles et des citadins.

Puis, je regagne l’appartement épuisé par mon aventure. Je regarde ma montre et je constate que j’ai marché pas loin de six heures : J’ai bien mérité ma pause nocturne. Demain je repartirai de plus belle, plusieurs visites de musées sont au programme, surtout que la météo a annoncé la seule journée pluvieuse de la semaine, notamment pour le matin. Je ne déteste pas la pluie, mais, je pense tout de même que c’est une raison de plus pour que je me mette à l’abri. Montréal étant dotée de deux musées relatant son histoire et sa fondation, c’est l’occasion d’y aller faire un petit tour.

Pour un passionné d’histoire comme moi, voilà l’opportunité de compléter mes connaissances sur l’origine du Québec en général, et de Montréal en particulier. Rendez-vous au Vieux Montréal, et à la Pointe-à-Callière plus précisément. Les deux musées qui m’intéressent tout particulièrement y sont situés, place d’Youville.

LES MUSEES, L’ILE SAINTE-HELENE :

Le lendemain arrive, nous sommes le mardi 22 septembre et, souviens-toi MEG, il pleuvait sans cesse sur Montréal ce jour là. Enfin non, pas sans cesse, seule la matinée est vraiment humide, notamment, et ce n’est pas plus mal, lorsque je réussis à m’abriter dans les musées. Mais, reprenons au début de la journée. Je reprends le métro à la station Fabre, bien évidemment, et je descends à Place d’Armes, empruntant cette autre portion de ligne que j’allais emprunter de nombreuses autres fois, partant de Berry UQAM et passant ensuite par les stations Champs de Mars - Place d’Armes – Square Victoria et Bonaventure. A ma gauche, le quartier chinois, à ma droite le surprenant Vieux Montréal ainsi que le Vieux Port. Je pars en direction de ce port que MEG m’a présenté comme incontournable. Je parcours quelques centaines de mètres à peine et j’arrive devant la Basilique Notre-Dame. Elle est en pleine cure de rajeunissement et disparaît sous les échafaudages. Avec elle commence le Vieux Montréal avec son allure de vieille ville française. Je descends la rue, droit devant moi, en passant entre les édifices d’une hauteur moyenne. Les devantures sont majoritairement celles de magasins pour touristes ou de restaurants. Le ciel est bas, mais la pluie semble encore m’accorder un sursis. Je décide donc d’en profiter pour effectuer une promenade sur le port. Je parviens vite sur la partie que j’estime, personnellement, la moins belle du Vieux Port : Celle qui abrite le cinéma IMAX ainsi qu’un vieux hangar en cours de démolition, ou de rénovation, je ne sais pas trop. Je pars sur ma gauche vers le Marché Bonsecours. Je débouche alors sur une grande esplanade aménagée le long de laquelle sont sagement alignés des pédalos. Voilà une zone de loisir bien calme et jolie. Je longe le lac artificiel ainsi crée et je m’avance au bord du fleuve. C’est vraiment incroyable l’impression de paix que je peux avoir ici ! Les gratte-ciel, tout proche pourtant, me paraissent si loin. Un peu comme un décor de cinéma que l’on aurait peint sur une toile géante. Montréal est en train de s’installer dans mon cœur, et j’en tombe lentement amoureux sans m’en rendre compte vraiment. Je repars, le pas tranquille et le cœur apaisé. Je quitte le port pour m’en aller vers l’hôtel de ville, le splendide hôtel de ville de montréal régnant sur la place Jacques Cartier. Seule la foule descendant des autobus de touristes trouble ma béatitude. La ville est belle et ses splendeurs sont soigneusement entretenues. La preuve en est faite par le château Ramezay datant du milieu du XVIIème siècle et encore en parfait état. Il abrite d’ailleurs un musée historique. Mais, voilà que les premières gouttes font leur apparition. La pluie, peu à peu, s’intensifie, au fur et à mesure que les rues se vident. Je me dépêche pour atteindre la place d’Youville encore assez loin.

Je commence à être bien mouillé lorsque je pénètre enfin dans le musée d’histoire de Montréal. C’est en fait l’ancienne caserne de pompiers de la place d’Youville qui a été transformée en musée. La visite m’emmène dans un grand retour en arrière, au temps des pionniers fondateurs de Montréal jusqu’au Québec d’aujourd’hui. La place d’Youville, et notamment le musée d’archéologie que je compte visiter ensuite, est l’endroit exact de la fondation de Montréal, érigée sur l’emplacement de l’ancien village indien d’Hochelaga, au pied du Mont Royal. Plus qu’un musée d’histoire, c’est un musée retraçant les modes de vie des habitants de Montréal. La visite est instructive sinon toujours passionnante. Partout, on trouve quelque chose à lire, à voir, à regarder, à écouter. De vieilles photos me feraient presque regretter de ne pas avoir connu le Montréal du début du siècle. Trois cent cinquante ans d’histoire seulement, mais déjà une identité forte. Montréal, la perle de l’Amérique. Montréal la généreuse pour ceux qui cherche à l’aimer. Je retrouve ici l’atmosphère de Montréal que j’aime. Je découvre Montréal sous la neige. J’apprends Montréal depuis 1642 jusqu’à maintenant. Je finis ma visite par un jeu à propos de montréal. J’ai encore beaucoup à apprendre apparemment, mes réponses sont bien souvent approximatives : Mais, bon, pour un étranger n’ayant passé, en tout et pour tout, que trois jours à Montréal, ce n’est pas si mal. Mais, je parle, je parle, et la visite est déjà terminée. Il me faut partir pour l’autre bout de la place, pour le musée d’archéologie. Au passage, je repère un petit restaurant où je me promets d’aller manger avant de repartir en France… Nous en reparlerons plus tard.

La place d’Youville est ornée d’un grand monument où sont apposées plusieurs plaques. Sur ces plaques sont inscrit les noms des pionniers et des fondateurs de la ville. Un peu plus loin, une autre plaque, sur le mur même du musée d’archéologie, indique le lieu précis de la création de Montréal, appelée, à l’époque Ville-Marie.

Je rentre alors dans le musée. L’attraction principale, à mon avis, de ce musée, est l’animation multimédia (c’est un mot à la mode), qui raconte l’évolution de la ville. Elle se déroule au milieu des vestiges, des pierres originelles des fondations des premières maisons de la Pointe à Callière. L’animation est prenante, réellement très bien faite. Après cela, je pars me promener dans des espèces de catacombes : Les fouilles archéologiques ont ici révélé toutes les constructions successives qui se sont élevées en ces lieux. Je me mets à penser à ces hommes courageux qui ont vaincu, souvent au sacrifice de leur vie, les pièges de cette terre sauvage, et qui, à force de volonté, ont construit une ville. Il y a quand même eu vingt morts sur vingt-huit lors du premier hiver ! C’est grâce à eux que je peux être heureux en visitant Montréal aujourd’hui, et je leur en suis reconnaissant. Dans ce sous-sol, passe une rivière, recouverte par la route depuis. De nombreux vestiges se dévoilent, village indien, entrepôt, poste de douane… Je ressors de là avec une nouvelle vison de Montréal. La pluie s’est arrêtée, et j’aperçois un peu de lumière transperçant à grand peine les nuages. Je décide donc de gagner l’île Sainte-Héléne où est installée la Biosphère, le musée de l’eau et des océans. Je m’en vais donc reprendre le métro que je commence à bien connaître.

Je ne vais pas mentir : je n’ai pas été particulièrement enthousiasmé par la visite de la Biosphère. Peut-être ai-je dû assimiler trop d’informations depuis ce matin. Peut-être suis-je fatigué. Toujours est-il que je n’accroche pas totalement au concept. Cependant, je dois reconnaître que certaines des expositions ou des animations me plaisent plutôt bien. Deux d’entre elles notamment. Au tout début, une salle est consacrée aux jeux de l’eau. Là sont rassemblés de nombreux instruments permettant de créer de la musique avec de l’eau, par simple contact de la main. De quoi s’amuser un bon moment. Tout près de là se trouvent des « sculptures », des œuvres d’art utilisant l’eau, bien entendu, comme base fondamentale. Un peu plus loin encore, des décors recréent l’atmosphère paradisiaque des tropiques avec, le soleil, le sable, les palmiers et, évidemment, la mer. Je passe ainsi plusieurs minutes de détente plus que d’instruction. Des minutes vraiment pas désagréables. Puis, je pars vers une animation extrêmement intéressante. Elle concerne l’état de santé du Saint-Laurent. Le fleuve a subi bien des outrages mais, maintenant, les efforts pour le sauver sont importants et, les premiers résultats sont encourageants. Je discute ensuite avec l’animatrice, spécialiste des problèmes de l’eau. Elle m’explique que ces efforts entrepris doivent perdurer et s’intensifier pour que la bataille soit un jour gagnée. Qu’il faut que l’on limite l’activité humaine et son impact sur ce majestueux fleuve, qui donne la vie à tout un pays. Mais, on peut avoir un réel espoir de réussir à préserver le Saint-Laurent et ses habitants. La discussion dure un bon bout de temps et est vraiment très intéressante. Je prends enfin congé de mon interlocutrice et je sors de la sphère pour me balader sur l’île Sainte-Héléne.

Voilà une belle île, un superbe coin de Terre où il fait bon errer, quand, au cœur de la semaine, personne ne dérange le calme de ces bois. Depuis le matin, en me promenant sur les quais du Vieux Port, j’ai remarqué une tour perdue au milieu des arbres, qui semble garder le chenal entre l’île et Montréal. Je me mets donc à marcher d’un pas décidé en direction de cette tour, à quelques centaines de mètres. Comme la veille, au jardin botanique, je découvre un paradis en pleine ville. La nature paisible m’entoure et j’avance sur le chemin accompagné des éternels écureuils. Je suis enchanté aussi par l’odeur qu’exhalent la terre et l’herbe encore humide. J’ai toujours aimé cette odeur, lorsque la pluie vient arroser le sol. Cette senteur éveille en moi l’impression d’être à la campagne, je ne sais pas pourquoi ni d’où cela me vient ! C’est ainsi. Les averses de la matinée ravissent mon odorat. Je n’entends plus que les bruits de la nature. Je ne vois que la nature, je ne sens que la nature. Je me prends à rêver d’être un de ces écureuils qui courent non loin de mes pas. Je me prends à rêver d’être un de ces pionniers, un de ces colons, un de ces vikings, un de ces amérindiens, qui ont connu ce pays encore vierge, encore intact. Je me sens bien et détendu : Impossible de croire qu’à deux cents mètres à peine se trouve la station de métro. J’ai l’impression que je pourrai me perdre dans une forêt vierge, sans que personne puisse jamais me retrouver. Oh ! Bien évidemment, çà et là de petits détails me rappellent la réalité : Là, j’aperçois un hôtel adossé à la colline, ici une voiture passe sur la route toute proche. Cette route qui mène au bout de l’île, où se trouve un grand parc d’attraction : Le parc de la Ronde. Partout la nature vit, triomphale, rassurante pour les âmes des voyageurs fatigués. J’arrive à la tour. Malheureusement, celle-ci n’est pas ouverte aux visiteurs, et, quand je vois quelques détails de l’intérieur, je comprends pourquoi. Je ne suis pas ici pour me tuer dans de périlleuses ascensions. Je reprends la route vers la rive toute proche, histoire de jeter un petit coup d’œil sur la belle Montréal, qui s’étend de l’autre côté du fleuve. La vue est agréable et le Saint-Laurent coulant au milieu lui donne un cachet particulier. Je resterai des heures entières dans ce bout d’île merveilleuse, mais j’ai tant de choses à faire, tant de choses à voir. Il faut que je reparte vers d’autres paradis, encore. Je reviens au centre de l’île en passant près d’une immense statue. Il est tard, et je dois rentrer si je veux pouvoir reprendre demain mes expéditions urbaines. Je regarde l’heure : le temps de rentrer et il sera presque dix-neuf heures. Neuf heures d’excursions aujourd’hui, c’est peut-être l’explication de mon mal de jambes naissant. Je prévois déjà un retour sur cette île pour en visiter la partie abritant le lac des cygnes et pour voir, aussi, l’île Notre-Dame toute proche où s’étend le circuit Gilles Villeneuve, théâtre du grand prix de Montréal de Formule Un. Pour l’heure, je redescends dans les entrailles de la Terre québécoise, pour prendre le métro qui doit me ramener au 1745 Cartier, où je pourrai, enfin, prendre un peu de repos.

Comment est-ce que je passe le temps le soir en attendant MEG ? La réponse est simple et quasi universelle dans le monde occidental : En regardant la télévision. Je découvre des émissions absolument délirantes. Même si mon manque de culture nord-américaine m’empêche de tout comprendre. Des jeux animés par Norman Braithwaite ou des séries télévisées à l’humour disjoncté ! (J’en ai déjà parlé un peu plus tôt). Mais, surtout, je regarde beaucoup les journaux télévisés, du matin comme du soir, pour mieux me plonger dans la vie montréalaise. Je peux mieux me rendre compte des ressemblances, mais surtout des différences, entre nos deux cultures. Je peux mesurer le fossé qui existe entre nos deux peuples. Il y a du bon et du mauvais des deux côtés. L’idéal serait de prendre le meilleur de chacun pour créer une nation presque parfaite. Mais, il me faut encore me contenter de choisir entre France et Québec. Mon choix est rapide : Les québécois sont des gens tellement formidables malgré leurs défauts. En tous cas bien mieux que les français, enfoncés dans leur immobilisme naturel. Je vous aime, amis québécois !

Encore une fois retenue à son travail, MEG ne rentre que très tard. Je ne peux pas lui exprimer à quel point j’aime sa ville et son pays. Mais, sa présence, une petite heure avec moi, me redonne du tonus. Sa gaieté permanente et son esprit optimiste ont vite fait de me faire oublier ma fatigue du jour. Franchement, je ne sais pas comment fait MEG pour avoir toujours le sourire : C’est peut-être la différence fondamentale entre le français râleur et le québécois fonceur. En tous cas, avec MEG, impossible de déprimer ou de se laisser aller ! Toujours est-il que c’est sur ses conseils que j’ai effectué ma promenade du mercredi.

LE MONT ROYAL :

Mercredi matin : Il fait presque froid ! La pluie de la veille a laissé place à une fraîcheur humide flottant sur la ville. Heureusement, la météo a annoncé une remontée rapide des températures. Je peux donc partir sans modifier mon programme. Je vais à la station Fabre et je m’embarque : Direction Côte-des-Neiges. Une nouvelle portion de métro pour moi. J’arrive à proximité de l’université de Montréal (la seconde francophone avec l’UQAM). Tout près de moi se dresse l’oratoire Saint-Joseph. C’est une immense bâtisse abritant, entre autres, une chapelle et une basilique. Il est perché sur la colline et domine ainsi la ville. C’est vrai que l’architecture, tant intérieure qu’extérieure, est superbe. Je ne suis pourtant pas extrêmement attiré par l’art religieux, et je ne pense pas qu’il est indispensable de traverser un océan pour visiter une église, si belle soit-elle. Mais, quand on est à Montréal, il me paraît idiot de rater l’une des pièces maitresses de l’architecture locale. L’endroit vaut vraiment le coup d’œil, même si je trouve que, parfois, ces lieux mériteraient un peu plus de calme et de recueillement. Après en avoir fait le tour, je quitte l’oratoire en ne me doutant pas que je pars vers le plus grand moment d’émotion de mon séjour à Montréal, voire de mon séjour au Québec (en dehors de mes retrouvailles avec MEG).

Je remonte la rue en longeant le cimetière de la Côte-des-Neiges, un cimetière à l’américaine qui s’étend à flanc de colline. Un vaste cimetière planté de milliers de croix, sagement alignées, et regroupées dans diverses parties : Française, polonaise, etc… Je commence vite à regretter de ne pas avoir pris le bus, car la pente est raide, lorsque j’arrive enfin, après trois quarts d’heures de marche, au pied de la merveille des merveilles, un joyau d’une pureté absolue : Le Mont Royal ! Le Mont Royal où a été aménagé un immense parc, conçu par le créateur de Central Park à New-York : Une sacrée référence. Je suis en bas du mont, au lac des castors, ou lac aux castors, cela dépend à qui l’on se fie… Il est bientôt midi et les montréalais commencent à arriver pour pique-niquer, ainsi que des touristes. Les oiseaux sont tellement habitués qu’il faut les chasser des assiettes où ils viennent se servir. Je ne compte plus les écureuils qui s’approchent pour voir s’il n’y aurait pas quelques miettes à récupérer. L’environnement du lac est très agréable et je regrette que l’on ne soit pas en hiver. Je viens, en effet, de découvrir les cabanes de location de patins à glace. J’imagine la foule des montréalais profitant des beaux jours de l’hiver pour venir s’amuser ici. Déjà je pense aux activités de mon futur voyage au Québec qui se fera, forcément, en hiver. Tout près, une remontée mécanique doit permettre aux skieurs de s’offrir quelques descentes sur une pente à la déclivité toute relative. Pour quelqu’un qui connaît les pistes noires des Alpes, celle-ci n’est en rien effrayante. MEG m’a promis, un jour, de m’apprendre à skier sur les pistes québécoises. Ici je pense pouvoir réussir à m’en sortir avec les honneurs. J’emprunte le chemin qui doit me mener au belvédère. Au fur et à mesure de mes pas, les pelouses laissent la place à la forêt. Une vraie forêt en centre ville, et pas un petit bois artificiel, non, une belle grande forêt ! Partout des sentiers pourraient me permettre de quitter le chemin goudronné pour m’enfoncer au milieu des arbres. Certains d’entre eux sont fermés pour cause de reboisement. Je les évite donc. Je parviens vite sur la crête et je m’offre une vue panoramique sur la route que je viens d’emprunter, pour venir de l’oratoire. Le temps de prendre une photo, et je poursuis mon cheminement. C’est alors que m’apparaît la première des vues saisissantes que le Mont-Royal va m’apporter, sans cesse, durant les prochaines minutes.

A gauche, la Côte-des-Neiges et, à ma droite, le centre ville. Les gratte-ciel si proche semblent me sauter au visage. J’ai l’impression que je pourrais les toucher en tendant la main. Je me rends mieux compte combien le centre ville, le véritable centre ville de Montréal, est compact, rassemblant dans un petit périmètre toutes les grandes tours de la ville. Je me rends aussi compte de l’enclavement de Montréal au cœur de la nature, partout si proche. Où que je regarde, mon regard est arrêté par des collines, où que je regarde, je vois des forêts, d’immenses espaces verts s’immisçant jusqu’au cœur de montréal. Puis, je vois le Saint-Laurent, imperturbable, qui s’écoule inlassablement, entourant Montréal, et faisant d’elle, à mon avis, l’une des plus belles îles urbaines du monde, faisant d’elle l’une des plus belles villes du monde. Je suis subjugué, et il me faut de longues minutes pour me remettre du choc émotionnel qui vient de m’envoyer au tapis : KO au premier coup d’œil.

Pour la première fois, je prends conscience que je viens, tout simplement, de tomber amoureux de Montréal. Mon cœur s’est échappé de ma poitrine et s’est offert à cette cité fascinante, cette métropole sublime. Je me sens comme un adolescent qui découvre brusquement la beauté des femmes. Mais, trop de monde circule encore autour de moi. Je veux m’échapper de la foule, rattraper par mon agoraphobie naturelle. Je veux fuir ces autres gens pour savourer égoïstement mon bonheur. C’est alors que j’avise un panneau en bois indiquant « le sentier de l’escarpement. » C’est le sentier qui longe la falaise, un petit sentier de terre serpentant entre les arbres et où les rencontres se font rares, surtout en semaine.

Je m’engage sur le chemin jusqu’à parvenir à la barrière métallique empêchant les imprudents de se retrouver plusieurs dizaines de mètres plus bas, en petits morceaux. Décidément, de chacun des jours que j’ai déjà passé au Québec, le Mont-Royal que je découvre aujourd’hui est le point d’orgue. C’est une merveille, et, s’il n’y avait pas le grondement sourd et continu montant de la ville, je pourrai croire que les tours sous mes yeux ne sont que des mirages, nés des délires de mon cerveau, subjugué par une cité à nulle autre pareille.

Je m’avance sur un escalier, descendant vers l’inconnu. Surgissant soudain derrière les arbres à ma droite, apparaît le parc olympique et son imposante tour : Ça c’est Montréal ! Son stade, ses gratte-ciel et ses arbres partout présents. Je remonte les quelques marches, que j’ai descendu pour admirer la vue, puis je repars en direction du belvédère du Mont-Royal où il paraît que la vue est encore plus belle. J’ai hâte d’y être. Toutes les centaines de mètres, un espace, plus ou moins aménagé, entre les arbres, me permet de prendre une bouffée d’images de la ville alanguie à mes pieds. La température est douce et ma promenade des plus excitante. Je suis envahie par une profonde impression de bien-être. Rarement je me suis senti aussi heureux de vivre, heureux d’habiter une planète finalement si belle.

Tout à coup, je découvre une vue que j’estime immédiatement exceptionnelle. Elle mérite, à mon sens, d’être immortalisée sur la pellicule de mon appareil photo. Elle n’est pas belle au sens esthétique du terme, mais elle résume à elle seule Montréal. Au premier plan, les arbres aux couleurs de l’automne, ensuite, à la limite de la ville, un petit château, sorte d’hôtel particulier à la française, dans un style du XVIIème ou XVIIIème siècle. Adossé à cette bâtisse, un terrain de football américain. Juste derrière cet ensemble hétéroclite, le centre ville de montréal, le centre d’affaires hérissé de tours. Au milieu, le Saint-Laurent baignant les rives de la verte île Sainte-Hélène. Plus loin encore, la banlieue résidentielle et ses milliers de maisons sans clôture. Enfin, dans le fond, les montagnes, dont le mont Saint-Hilaire, tapissées d’un vert presque uniforme.

Pour moi, voilà le symbole même du Québec, le symbole de cette province aux racines multiples et complexes, et aux paradoxes culturels. Un mélange de béton et d’arbres, un affrontement entre francophonie, anglophobie et anglophilie. Une culture distincte du voisin américain et fière de ses différences, mais qui a quand même fait quelques emprunts à cet encombrant voisin. Modelant le tout à son image pour ne faire plus qu’un bloc inébranlable. Une culture forte et combative. Montréal, la plus européenne, peut-être, des villes américaines et, à mes yeux, la plus américaines des villes européennes. De l’Europe, elle a gardé l’humanité et les racines linguistiques et sentimentales. La devise du Québec n’est-elle pas : « Je me souviens ? » Mais, je me souviens de quoi ? De tout peut-être. Montréal n’a pas oublié que la vieille Europe, la France plus précisément, l’a abandonné un jour, à cause de son éloignement. Alors la ville a mis cet éloignement à profit pour se forger, à force de volonté, une image bien à elle. Une image américaine dans son architecture et son urbanisme géométrique. Une image européenne dans son mode de vie festif, presque latin. Une image américaine dans son orgueil et aussi son accueil chaleureux. Une image européenne dans son enracinement culturel, pour résister au milieu du déferlement anglophone. Montréal survivra parce que Montréal veut survivre. Parce qu’elle a su prendre ce qu’il y a de meilleur dans les deux cultures qui s’y côtoient.

Je me détache difficilement de ce spectacle et je reprends ma route vers le belvédère tout proche. Après une dernière grimpette, je parviens sur l’esplanade où flottent fièrement, en haut de leurs mâts, les drapeaux du Québec et de Montréal, mais pas celui du Canada… Au cas où je ne me serais pas encore aperçu que j’étais au Québec, en voici la preuve formelle ! Je m’approche de la rambarde en traversant l’esplanade où mangent de jeunes montréalaises, je pense, fort jolies ma foi. Mais, je m’égare. Veuillez m’en excuser. Une plaque commémorative est apposée sur la rambarde et me rappelle que Jacques Cartier, accompagné d’une partie de la tribu indienne du village d’Hochelaga, parvint ici le 2 octobre 1535 et que « devant la beauté du paysage, il lui donna le nom de Mont-Royal », qui donna plus tard son nom à Montréal. Je me répète peut-être, mais la vue que l’on a d’ici est splendide, je comprends Cartier même si quatre cent cinquante ans se sont écoulés. La ville est belle. Son cœur de béton bat tout près de moi, et il donne vie à la superbe Ville-Marie, devenue Montréal.

Le temps de me restaurer quelque peu, et je redescends les marches qui mènent au chemin qui conduit au centre ville. Moins de cinq minutes plus tard, je débouche sur la rue Peel, bordée des différents bâtiments de l’université McGill. Je descends la rue, croisant au passage la rue Sherbrooke puis la célèbre rue Sainte-Catherine, en direction des gratte-ciel qui se dressent devant moi. J’arrive sur le Square Dorchester. En face de moi, la cathédrale Marie-Reine-du-Monde, réplique de Saint-Pierre de Rome, en proportions réduites. La tour du Mille de la Gauchetière s’élève juste devant moi. Elle est, paraît-il, la plus haute de Montréal, mais cela reste à vérifier. A ma droite, le château Champlain et la tour Marriott. Encore plus à droite, la tour IBM et la tour de la banque La Laurentienne. Certaines de ces constructions me laissent plus ou moins indifférent. D’autres, en revanche, sont d’une rare élégance, d’une très grande valeur esthétique. Les reflets, qui jouent avec leurs façades vitrées, donnent parfois une impression de vertige. Je me tourne à gauche et j’avance vers l’hôtel Reine Elisabeth. Cet hôtel est un peu un lieu de pèlerinage païen pour moi. En effet, c’est là qu’a été enregistrée la chanson « Give Peace A Chance » de John Lennon, lors d’un Bed-In en 1969. Dans la chambre 1742 pour être précis. Je m’insère dans la foule, mélanges d’hommes et de femmes d’affaires pressés, et de touristes de tous les pays. Cela me change du calme bucolique du Mont-Royal. Cependant, je dois reconnaître que toute cette agitation ne me déplaît pas. Je me sens en sécurité dans ces rues. Un peu comme si Montréal avait décidé de veiller sur moi, comme si elle me considérait comme un de ses fils. Mon comportement est à mi-chemin entre celui d’un banal touriste et celui d’un découvreur. Je pense, sincèrement, que je n’ai pas la même approche de Montréal que tous ces touristes de passage. Je vois certainement des détails qui leurs échappent, car ils ne prennent pas le temps de les regarder. Car ils ne prennent tout simplement pas le temps de réfléchir, de s’imprégner de la beauté qui les entoure. Bien sûr, parfois je me conduis comme eux. Bien sûr, je vais, moi aussi, au Hard Rock Café et je me laisse attirer également par les magasins de souvenirs. Mais, tout ceci ne me fait pas oublier la réalité d’une ville qui n’est pas un musée. Une ville qui vit et bouge continuellement.

Je parcours la rue Sainte-Catherine jusqu’à la Place des Arts, exemple de l’architecture moderne avec ses qualités et ses défauts. A côté, une église apparaît, accolée à la place. Une vieille église perdue au beau milieu des immeubles. Derrière cette église, l’église Saint-James il me semble, une tour de verre s’élance vers le ciel. Le reflet de ce vieux clocher de pierre se reflétant dans les vitres offre une image magnifique. Je repars dans l’autre sens, en empruntant le trottoir d’en face. Je passe, presque sans m’en rendre compte, devant le Spectrum de Montréal. Je possède une cassette vidéo d’un concert de Robert Charlebois qui a été enregistré justement au Spectrum. La salle est grande et l’aménagement intérieur, apparemment, très bien pensé. Pourtant, quand je passe devant l’entrée, j’ai l’impression de voir un vieux cinéma presque abandonné. L’entrée est banale et semble tomber en décrépitude. Rien n’indique que l’on pénètre par-là dans une des plus belles salles de spectacle de la ville. Je continue mon excursion en étant un peu surpris, pourtant on m’avait prévenu, par le nombre de boutiques et de spectacles ayant trait au sexe : La rue devrait être interdite aux mineurs par endroit… C’est un peu Pigalle sur les Champs-Elysées (bon, d’accord, j’exagère un peu, mais je n’ai pas trouvé de meilleur exemple).

Je m’engouffre finalement dans la ville souterraine pour prendre le métro à la station Bonaventure. Il faut pour cela que je parcours un temps la ville souterraine, cette ville qui s’étend sous le centre ville. Je prévois déjà mon vendredi pour déambuler plus longtemps dans ces couloirs. Pour l’heure, mes jambes me lâchent. Encore neuf heures trente de marche aujourd’hui : Je suis cuit ! J’en ai bien pour une demi-heure de transport pour rentrer. Je dois penser à me ménager, j’ai encore deux jours à tenir ! Mon programme ne comporte plus que quatre étapes : La fin de la découverte de l’île Sainte-Héléne, le tour de l’île Notre-Dame (et du circuit Gilles Villeneuve), la visite de la ville souterraine, et la fréquentation assidue des magasins de souvenirs pour acheter les cadeaux pour la famille, les amis, et un peu pour moi aussi. De plus, je sais que MEG ne sera pas là demain soir. Je dois me trouver un restaurant : Je repense à celui de la place d’Youville. Dès mon arrivée à l’appartement, je prends mon guide et l’y trouve : C’est déjà bon signe. Le guide dit que le restaurant n’est pas mauvais du tout, et que les tarifs sont très acceptables. Je sais où me restaurer, c’est un bon début ! Je me couche, la tête pleine des images du Mont-Royal, le cœur désormais tout acquis à ma bien-aimée Montréal.

PARFUM DE PROVENCE – MONTREAL BY NIGHT :

Le jeudi matin arrive : Le soleil est, encore et toujours au rendez-vous. Décidément, la météo me gâte pour mes deux semaines, et cela ne me déplaît pas. Comme tous les matins, je me réveille peu avant huit heures, au moment du départ de MEG. J’aime me lever tôt pour pouvoir m’éveiller en douceur et me préparer tranquillement. De plus, j’apprécie d’avoir l’occasion de dire un petit bonjour à mon hôtesse avant qu’elle ne parte. J’ai si peu d’opportunité de la voir au cours de ses journées à rallonge : De l’apercevoir quelques secondes avec son éternel sourire, cela suffit pour me mettre de bonne humeur !

Ce matin, je vais prendre mon temps, tout mon temps. Je ne suis pas pressé et puis, la journée va se prolonger jusque tard : Vingt-deux ou vingt-trois heures je pense. Cela ne me dérangerait pas en temps normal, j’ai l’habitude de me coucher tard, souvent après minuit. Je ne sais pas si c’est encore l’effet du décalage horaire ou le changement d’air, mais depuis que je suis arrivé au Québec, je me sens rapidement fatigué quand vient le soir. Je vais donc ralentir le rythme de cette journée qui s’annonce. Je vais partir vers midi pour aller manger en ville, sans doute, comme d’habitude, un hamburger et quelques frites dans un des innombrables petits restaurants du centre ville. Je dois aussi consacrer une grosse partie de cette journée au magasinage : J’ai bien envie de visiter les plus grands magasins de Montréal spécialisés dans la musique, les disques et les instruments. Après m’être calmement mis en route, je m’en vais prendre le métro qui va me conduire à la station Berry-UQAM. Sitôt débarqué de la rame, je reprends mon aventure sur la rue Sainte-Catherine. J’arrive rapidement devant l’un des magasins. J’y pénètre, content de retrouver un peu mon univers musical. J’avoue que je m’attendais à mieux, surtout en ce qui concerne les tarifs. Bien sûr, les disques, comme partout au Québec, sont notablement moins onéreux qu’en France : Parfois jusqu’à cinquante pour cent de moins. Cependant, les instruments de musique, eux, me paraissent à peu près aussi chers que chez moi. Peut-être est-ce dû au fait qu’ils viennent du Japon, et que les prix pratiqués sont ainsi plus ou moins les mêmes partout dans le monde. Il me semble, en effet, que les instruments fabriqués aux Etats-Unis et au Canada, notamment les guitares Godin, affichent eux une baisse sensible par rapport à l’Europe, ainsi que les logiciels conçus eux aussi en Amérique du Nord. Je suis quand même un petit peu déçu : Apparemment, faire de la musique reviens à peu près aussi cher des deux côtés de l’Atlantique…

Je ressors sur la rue Sainte-Catherine et je m’en vais, crois-je, en direction du centre ville. Je ne saurais jamais pourquoi je n’ai pas remarqué qu’aucun gratte-ciel n’apparaissaient à l’horizon. J’ai marché plus d’une demi-heure vers l’inconnu, sans me rendre compte que je m’en allais dans le mauvais sens. Cela m'a permis de faire plus ample connaissance avec cette fameuse rue. Mais, ce n’est pas la partie la plus intéressante. Lorsque je m’aperçois de ma méprise, je fais demi-tour et je me maudis en moi-même pour ce détour inutile. Et c’est bien énervé que je parviens Place des Arts. De là, je pénètre dans la ville souterraine pour en découvrir l’atmosphère. Je n’y reste pas longtemps : J’ai faim, il est tard, et j’ai tant d’achats à effectuer. Les magasins qui foisonnent dans la ville souterraine ne sont pas de ceux qui peuvent m'être utiles. Ils sont souvent trop luxueux, trop chers, quoique cela aille fréquemment de paire. Je reparais à l’air libre… Et je me rends compte que je suis carrément perdu. Mon sens de l’orientation est mis à rude épreuve aujourd’hui. Heureusement, le sommet des tours me donne une indication sur la direction à prendre pour rejoindre mon objectif. Je me jette dans le premier restaurant venu et, pour une somme ridicule, moins de vingt-cinq francs, je me cale l’estomac. Je pars ensuite me réfugier dans le calme, tout relatif, du Vieux Montréal.

Je possède près de quatre cents dollars canadiens, il faut bien que je m’en débarrasse avent de partir. En comptant qu’il m’en faut une bonne soixantaine pour les repas, cela m’en laisse plus de trois cents, mille deux cents francs français au bas mot, à dépenser en souvenirs, cadeaux et autres babioles. En sachant que les prix sont souvent inférieurs à ceux pratiqués en France, cela me laisse une bonne marge de manœuvre. Surtout que, grâce à MEG, et à ses amis, j’ai fait de substantielles économies par rapport à mes prévisions. Je prends le même chemin que celui que j’ai emprunté mardi, descendant de la station Place d’Armes pour me rendre jusqu’à la place du même nom, arrivant devant la cathédrale. De là, je rejoins la rue Saint-Paul, une des principales rue touristique du Vieux Montréal. J’ai l’impression que les gérants des magasins se sont entendus, pour que les touristes doivent pénétrer dans chacune des échoppes pour découvrir toutes les marchandises proposées. En effet, chaque magasin, quasiment, offre un souvenir que l’on ne trouve pas chez ses voisins. C’est ainsi que je dois faire la presque totalité des boutiques pour réaliser mes achats. Cela me prend de nombreuses heures pour dénicher ce qui correspond à mes envies. Je regarde ma montre : Il est déjà cinq heures ! Il est temps que je rentre me préparer pour ma sortie nocturne. Le temps que je retourne jusqu’au métro, que je rentre à l’appartement, que je me change et que je revienne ici pour manger dans le petit restaurant, que j’ai repéré place d’Youville, et les deux heures qu’ils me restent se seront écoulées. Il est grand temps que je me décide à bouger.

Je rentre donc et je m’habille pour la circonstance. J’enfile un sweat-shirt arborant le sigle de la coupe du monde de football, France 98 (ceci va avoir son importance). Puis, je repars pour le 351, place d’Youville. Je prends tout d’abord la précaution de consulter ma carte de Montréal pour choisir le chemin le plus court. Je constate que, cette fois-ci, je dois descendre station Square Victoria et, qu’ainsi, je n’aurai plus qu’à suivre la rue McGill pour parvenir directement à : « La Gargote. »

Pourquoi ai-je donc remarqué ce restaurant plutôt qu’un autre ? Tout simplement parce que, en sortant du musée d’histoire de Montréal, j’ai aperçu une grande banderole, immanquable par sa taille, proclamant la victoire de la France en coupe du monde. Bien évidemment, je me suis dit immédiatement que cela devait être un restaurant français. J’avais raison ! Mon guide confirmant la bonne tenue de la cuisine, je m’y rends donc pour retrouver un peu le goût de mes habitudes. Je n’ai pas le moins du monde le mal du pays, mais cela m’amuse de faire un clin d’œil culinaire en fréquentant un restaurant français en plein cœur de Montréal. Je parviens vite devant la porte. Je constate que les prix sont abordables, vraiment pas excessifs, et qu’il est possible de manger très convenablement pour moins de cent francs. L’adresse m’a l’air bonne… Je pousse la porte et, là, je me retrouve chez moi. Non seulement c’est un restaurant français, mais, en plus, il est provençal. L’affiche de Marseille me saute immédiatement aux yeux. Partout je peux voir des objets, des livres évoquant la Provence. Je m’installe, le cœur joyeux, et je commande un mignon de bœuf sauce béarnaise. Un vrai régal ! Et, en plus, la portion n’est pas mesquine. J’ai eu raison de venir. Je suis vite repéré, grâce à mon chandail. Le patron vient discuter cinq minutes avec moi. J’apprends alors qu’il est de Toulon : C’est un voisin ! On parle un peu de l’OM, racines sudistes obligent, et de l’équipe de France de football. Il paraît que la fête dans Montréal a été surprenante par son intensité. Français émigrés, québécois amateurs de soccer et québécois amateurs de fêtes, ont, me dit-il, fêté dignement la victoire, avec force alcool. Je finis mon repas par un bon gâteau et je peux partir, content d’avoir trouvé un petit coin de France au Québec. Si un jour j’ai la chance, le bonheur, de m’installer à Montréal, ou dans sa région, il est certain que je reviendrai ici. Parce qu’en plus la cuisine est bonne et qu’on y mange à sa faim. Et, même si je reviens en vacances un de ces jours, je repasserai faire un tour à « La Gargote », avec quelques amis québécois, par plaisir gustatif : Ce sera « le fun ! »

Il ne fait pas froid dehors, et il n’est pas vraiment tard. MEG, elle, ne doit revenir qu’après vingt-deux heures, au minimum. Quelque chose me dit que le centre ville du Montréal « by night », mérite sans doute une petite visite. Je reprends alors, une nouvelle fois, le métro en direction de la place Bonaventure. Je crois que je pourrai maintenant traverser Montréal les yeux fermés. Je connais le métro par cœur, ma carte hebdomadaire est amortie depuis belle lurette.

Ce qui me surprend, en premier, en ressortant à l’air libre, c’est la calme qui règne dans les rues. Evidemment, le centre ville est, avant tout, un centre d’affaire, ce qui fait que, la nuit venue, il se vide peu à peu. Ne subsistent alors que les employés finissant leurs heures supplémentaires et les rares touristes m’imitant dans mes déambulations nocturnes. Cela me fait tout bizarre de marcher entre ces géants de béton, abritant le jour des milliers de personnes, et maintenant presque vides. Ils semblent d’immenses fourmilières abandonnées par leurs colonies d’insectes ouvriers. L’atmosphère est froide, impersonnelle. Pourtant, l’architecture brillant de mille feux est splendide. Peut-être, certainement, encore plus belle que le jour. Je me sens libre, rien ne m’oppresse. Quelques voitures passent, des chauffeurs de taxi regroupés non loin de l’hôtel Reine Elisabeth discutent entre eux. Je me sens bien et regrette d’autant plus d’être seul. Je voudrais partager mes émotions, mes sensations, avec quelqu’un qui saurait me comprendre à demi-mots. Je ne sais pas si mes amis de France apprécieraient autant que moi cette atmosphère particulière. Je me demande si MEG a ressenti les mêmes émotions que moi en passant ici. Après tant d’années et d’habitudes, elle ne remarque peut-être même plus les beautés de sa ville. Pris dans mes rêves, je ne sais même pas jusqu’où j’ai pu aller, emporté au hasard de mes pas. Je reviens finalement à mon point de départ, sans trop savoir comment. En tous cas, me voici de nouveau devant la station de métro. Je me dis que cela doit être l’heure d’aller dormir. Je repars donc. J’arrive à l’appartement, il est près de vingt-deux heures trente. MEG ne devrait plus tarder. Elle doit me communiquer le programme de demain soir. En principe, nous devons sortir avec ses amis de travail. Quelque chose me dit que je vais avoir du mal à tout comprendre de la conversation, enfin, on verra… Au bout de deux semaines, je suis habitué à l’accent québécois, mais certaines phrases m’échappent encore. Surtout si elles sont prononcées rapidement, dans le brouhaha et au milieu de l’excitation générale. Je fais confiance à MEG qui sera là pour m’expliquer, et se moquer un peu de moi aussi… Et peut-être également pour « me traiter d’épais, tant qu’à y être ! »

L’ILE NOTRE-DAME - LA VILLE SOUTERRAINE:

Les prémices mélancoliques de mon départ prochain arrivent avec ce vendredi matin. Ma dernière journée entière, et ma dernière nuit à Montréal se profilent à l’horizon d’un jour ensoleillé. L’ombre de ce retour en France attriste mon cœur. Seule la perspective de revoir mes amis restés à Marseille parviens à ma consoler, et encore, pas tout à fait. Je ne suis pas parti du Québec et, déjà, je songe à y revenir. Je me lève avec difficultés, paresseusement. Je suis fatigué. Il faut reconnaître que ma semaine a été bien remplie et fructueuse. Que vais-je faire aujourd’hui ? Tout d’abord, je vais me rendre une dernière fois sur l’île Sainte-Hélène, puis sur l’île Notre-Dame. Ensuite, en fonction de l’heure, je retournerai dans le labyrinthique dédale de la ville souterraine. Je m’engouffre dans le métro, essayant de saisir le moindre détail de mon environnement pour m’en souvenir plus tard. Après les changements habituels à Jean Talon puis à Berry UQAM, j’arrive une ultime fois sur l’île Sainte-Hélène. Je pars en direction du lac des cygnes. Je parviens rapidement à une statue en plein air de Calder : L’homme. De l’autre côté du fleuve, se dresse le centre ville, pourtant j’ai l’impression d’être sur une île déserte et sauvage. J’erre dans mes pensées expectatives tout en suivant le chemin côtier. Peu à peu, je tourne le dos aux gratte-ciel et je me dirige droit vers l’île Notre-Dame. Je passe le pont et je me retrouve directement sur le circuit de Formule Un, ouvert à la circulation tout au long de l’année. Par jeu, je me mets à suivre le parcours, dans le sens suivi par les bolides du mois de juin. A l’une des extrémités du circuit, se terminant par une épingle à cheveux, je découvre le bassin olympique d’aviron, aménagé sur cette île artificielle bâtie sur des milliers de mètres cubes de remblais. Je poursuis ma route vers la ligne des stands et la ligne d’arrivée. Je parviens à la chicane, où Jacques Villeneuve est sorti de piste au premier tour, en 1997 je crois, qui amène sur la ligne droite. Malheureusement, je ne pourrai pas fouler le bitume du circuit sur toute sa longueur. Une série télévisée est en cours de tournage, juste devant la tribune officielle, et je me vois contraint de monter sur le muret. A ma droite s’élève le casino de Montréal qui est établi dans le pavillon français de l’exposition universelle de 1967. Je ne m’imagine pas essayant d’y rentrer. Je ne suis pas sûr qu’ils acceptent les jeunes gens habillés en jean, tee-shirt et chaussures de sport. Ce n’est de toutes façons pas ma préoccupation. Dès que je le peux, je redescends sur la piste et continu mon tour de reconnaissance. Je négocie la première chicane, dépassé par des cyclistes et des patineurs (sur roulettes, bien sûr). J’arrive bientôt à un virage sans visibilité, interdit aux piétons. Je me vois donc dans l’obligation de passer par l’échappatoire, puis de redescendre à travers les arbres. Oui, à la télévision, on a l’impression que le grand prix se déroule en pleine ville. Alors qu’en réalité, il a lieu dans un véritable écrin de nature. Un îlot remplis d’arbres, de petites rivières et d’animaux. Je reconnais l’endroit où Olivier Panis s’est blessé, toujours en 1997, il me semble même voir une éraflure sur le mur (mais peut-être est-ce dû à mon imagination fertile). Une dernière série de virage serrés et me voici sur la grande ligne droite, où je n’ose imaginer les vitesses vertigineuses que doivent atteindre les monstres mécaniques. Voilà, le tour est fini. Cela fera le deuxième circuit de Formule Un que j’aurai arpenté après celui de Monaco. Mais, ce dernier a l’avantage de la proximité.

Tout à coup, je me souviens que, parfois, je dois penser à m’alimenter. Sans doute trouverai-je un restaurant sympa et sans prétention dans la ville souterraine. Je fais mes adieux aux îles, et je m’en retourne dans le métro. Encore un dernier effort et j’aurai vu tout ce que je voulais voir. Devant mes yeux pourront longtemps danser les images hypnotiques de cette ville ensorcelante. Je descends une nouvelle fois dans les entrailles de Montréal. Je repasse une dernière fois le fleuve pour revenir dans la civilisation urbaine.

J’aboutis station Bonaventure. Je me plonge dans la foule, en mouvement perpétuel, des sous-sols. Je m’en vais en direction des noms célèbres de cette ville de l’hiver : Place Ville-Marie, Place National Trust. J’ai lu, quelque part, que la ville souterraine serait le deuxième plus grand centre commercial du monde. Je comprends vite pourquoi ! Partout des boutiques ! On doit y vendre absolument tout ce qu’il est possible de désirer. A part, peut-être, des voitures, dont l’utilité ici serait proche du zéro absolu. Je ne dois pas oublier de téléphoner à MEG, pour qu’elle me confirme l’heure et le lieu exacts de notre rendez-vous pour la soirée. Je pourrai même aller la voir à pied : toutes les tours possèdent une entrée directe à partir de la ville souterraine. Je n’aurai même pas besoin de ressortir d’ici. Mais, d’une, je n’oserai pas la déranger, et, de deux, je suis bien incapable de me diriger correctement dans cet enchevêtrement de rues, sur plusieurs étages qui plus est. L’endroit est à déconseiller fortement aux claustrophobes et autres agoraphobes graves. Et, que de bruit ! Je me croirais dans un concert de rock. Sans doute cela est dû au fait qu’il est moins d’une heure, et que les restaurants sont pleins des employés travaillant au centre ville profitant de leur pause. Plus je marche et plus j’ai l’impression de me perdre. Je ne sais absolument pas où je suis à l’heure actuelle, et je commence à me dire que je vais devoir emprunter l’une des sorties vers l’extérieur pour parvenir à me réorienter. Tout à coup, au détour d’un couloir, je me vois rendu place National Trust. Celle-ci je la reconnais grâce à son immense, et superbe, fontaine intérieure. C’est vraiment beau ici. Les étages, que je vois tout au-dessus de moi, me donnent un sentiment de vertige. Je ne sais plus ce qui est en surface. Je grimpe quelques étages mais, subitement, je me rends compte que je suis un habitant de la surface, pas des profondeurs. L’angoisse s’instille doucement en moi. Je préfère sortir avant de commencer à paniquer ou à déprimer. Je retrouve le soleil avec soulagement. Je pars vers le bas de la rue, sachant que je finirai bien par croiser la rue Sainte-Catherine. En effet, quelques secondes plus tard, j’y parviens. Maintenant je sais où je suis : Je peux reprendre tranquillement mes esprits. J’ai faim ! Courageusement je replonge dans les sous-sols, mais en prenant soin de choisir des endroits calmes. Il ne fait pas de doute que si j’ai l’occasion de fréquenter de nouveau la ville souterraine, et que si j’apprends à m’y diriger aisément, je pourrai facilement calmer la panique qui m’a saisi aujourd’hui. Le plus dur à supporter, pour moi, c’est la foule. Je dois avouer que c’est véritablement cela le plus douloureux pour mon esprit. Je m’installe à une table un peu à l’écart et je me mets à manger de bon appétit. Cela me redonne quelques forces mentales. Je finis vite mon repas et je me réinsère dans la foule, maintenant beaucoup moins dense. Je téléphone à MEG. Elle n’est pas à son bureau, tant pis ! Je la rappellerai plus tard. Pour l’heure, je m’en vais au Vieux Montréal me promener et finir mes achats.

DERNIERE SOIREE :

J’appelle MEG à partir d’une cabine téléphonique du métro : Elle est enfin là ! Rendez-vous est pris à dix-neuf heures trente devant le « Steak et Frites », dans le Vieux Montréal. Il est à peu près quinze heures, j’ai donc tout le temps devant moi. Je vais visiter les derniers magasins qui ont encore échappé à ma perspicacité. J’y trouve un petit cadeau pour MEG, pour la remercier de sa gentillesse, pour la remercier pour les deux semaines formidables qu’elle m’a permis de passer au Québec. Je ne veux pas qu’elle croit que je suis insensible à tout ce qu’elle a fait pour moi. Je cherche aussi une canadienne (pour m’habiller, pas pour épouser), une veste polaire si vous préférez, car je sais qu’ici elles sont vraiment efficaces… Et pas chères en plus. J’en découvre une parfaite, toute douce et chaude à n’en plus pouvoir. Et bien voilà ! Il ne me reste plus qu’à trouver l’objet symbole de ma venue : Un porte-clés, du même type que celui que j’ai cassé juste avant de venir. Je le découvre dans le tout dernier magasin où je pénètre, mon dernier objectif est atteint. Je n’ai plus qu’à rentrer déposer mes achats et revenir ensuite ici pour manger. J’arrive à la station et… Pas de chance, le métro est en panne. Une heure se passe à attendre qu’il soit remis en service puis que le surnombre de voyageur soit absorbé. Si cela s’était passé en France, tout le monde aurait râlé, aurait essayé de voler une place dans la file d’attente. Ici, rien de tout cela : Tout est accepté avec philosophie et bonne humeur. Puisqu’on ne peut rien y faire… Pourquoi se taper dessus pour de telles futilités ? Les plus pressés n’ont qu’à prendre un taxi, ou le bus, ou s’en aller à pied. Je rentre à l’appartement : Il est dix-sept heures. Ma dernière soirée à Montréal débute, je suis prêt à l’affronter.

Je reviens rue Saint-Paul. La soirée est douce et je suis un peu en avance. Je fais quelques pas sur le trottoir, admirant Montréal sous les lumières de le nuit. J’ai beaucoup de mal à me convaincre que demain soir, à la même heure, je serais dans l’avion, prêt à quitter ce pays qui a fait chavirer mon cœur. Exact au rendez-vous, MEG et ses amis arrivent. Nous rentrons dans le restaurant qui va se révéler bon et copieux. Décidément, ma fin de séjour se révèle être gastronomique. MEG doit avoir l’habitude de manger ici… En tous cas, elle connaît exactement ce qu’elle veut sans avoir besoin de la carte. La soirée se déroule très agréablement, dans la bonne humeur généralisée. Tout se passe dans l’optimisme communicatif de ces québécois que j’apprécie tant. Mes amis me connaissent. D’ordinaire, je suis d’un naturel très timide, excessivement réservé. Tellement que le son de ma voix, parfois, me surprend moi-même. Pourtant, emporté par la chaleur québécoise, je me laisse, un petit peu, aller. Peut-être est-ce dû à la culture canadienne, si différente de la mienne, mais je me sens rapidement intégré au sein du groupe. Que je sois français, simple touriste, ne semble pas les déranger outre mesure. Le fait est que je me mêle, timidement encore, à la conversation. Parfois, quelques mots m’échappent, comme je l’avais prévu, mais MEG, ainsi que tous les autres convives, font preuve d’une grande patience envers moi et, finalement, mon vocabulaire s’enrichit de quelques mots nouveaux. Je me sens à l’aise, c’est étonnant chez moi. Je fais d’emblée partie intégrante de la micro-société que nous formons en cette soirée. Que ne suis-je aussi à l’aise en tous temps et en tous lieux ! Ma vie en serait grandement facilitée. Vers vingt et une heures, nous traversons une partie de la ville pour aller prendre un dessert dans un des lieux réputés pour cela. Je comprends vite pourquoi : Des dizaines de gâteaux, de toutes sortes, s’offrent à notre gourmandise en une accumulation appétissante. Après avoir dégusté chacun notre part, nous rentrons à l’appartement. J’apprends au cours de cette soirée un jeu de carte qui a vite fait de m’énerver un peu… Parce que je perds ! Et je n’aime pas ça (non, je rigole !). Les filles travaillant, hélas, le lendemain, nous nous quittons peu après minuit. Je m’en vais me coucher, mais je trouve difficilement le sommeil. Une grande tristesse s’empare irrésistiblement de moi. Elle me murmure à l’âme que je risque de regretter longtemps cet endroit, car il a su toucher ma corde sensible. J’aime le Québec, j’aime Montréal, j’aime les québécois (ne l’ai-je pas déjà dit ?). Tant de mots, d’expressions, de noms, de lieux tournent dans ma tête. Je les entends, prononcés par la voix, avec l’accent de MEG. Demain, tout à l’heure, il faudra que je reparte vers la vieille, la languissante Europe, et cela me consterne.

COMPTE-A-REBOURS :

Et voilà, me voici arrivé à la fin du voyage. Nous sommes samedi matin. Le jour paraît, il brise la nuit, la déchirant des pointes des rayons de son soleil naissant. MEG part pour un travail d’une heure, qui se verra malheureusement multiplié presque par quatre. Je n’ai pas envie de me lever. Pourtant, il va bien falloir que je trouve le courage de quitter mon lit. J’ai l’impression que, lorsque mes pieds vont toucher le sol, cela va déclencher la minuterie du compte à rebours fatal, le décompte de mes douze dernières heures québécoises. Je regarde ma valise, que j’ai eu bien du mal à fermer hier soir. Elle est pleine, heureusement qu’elle est solide ! Je me lève enfin, mais je me sens abattu ce matin. Je vais attendre MEG en regardant la télévision. J’en profite aussi pour ranger le salon qui m’a servi de chambre. Pour qu’il retrouve l’allure qu’il avait avant que je débarque, bouleversant les habitudes de la jolie brune aux yeux rieurs que j’ai eu la chance, un beau jour, de connaître.

Les heures défilent vite, tellement vite. Et MEG ne rentre toujours pas. Je suis déçu, autant qu’elle je crois. J’aurai tant aimé passer cette dernière journée avec elle. Heureusement, elle m’a annoncé une grande, une très grande nouvelle : Bientôt, avant l’été prochain, elle va venir en Europe ! Et bien entendu, en France, chez moi. J’ai dû attendre quatre ans, un mois et vingt-huit jours avant de la revoir, cette fois-ci, l’attente sera beaucoup moins longue. Je vais pouvoir m’efforcer de lui rendre tout ce qu’elle m’a donné, au cours de mes deux semaines de présence auprès d’elle. Elle m’a supporté patiemment, avec le sourire, malgré mes erreurs. Elle a accepté ma présence avec, j’espère, du plaisir. Elle a su effacer les soucis qui auraient pu troubler le bon déroulement de mon voyage et de nos vacances. Je ne la remercierai jamais assez.

Je pense à tout cela et, pendant ce temps là, l’heure tourne. Midi approche et j’entends MEG qui arrive enfin. Je suis heureux de la voir, toujours souriante malgré son agacement. Nous avons encore un peu de temps devant nous, par chance. Les photos qu’elle a prises durant notre périple québécois sont développées. Nous les regardons ensemble, et les premiers souvenirs reviennent déjà à la surface. Tout cela me parait déjà si loin, c’est déjà du passé et pourtant encore si présent dans mon cœur. Je prends quelques doubles et je choisis les photos que MEG fera refaire pour mes les envoyer en France : Les images des baleines sont vraiment très réussies. En plus de toutes ses qualités, MEG est une excellente photographe, on dirait. On mange une dernière fois ensemble, ce soir MEG a une réunion avec ses camarades de promotion pour fêter la fin de ses études, brillantes études ! Elle ne pourra donc pas rester longtemps avec moi à l’aéroport. Cela me fait un peu de peine bien sûr, mais, d’un autre côté, j’aime mieux ça. Je n’ai pas trop envie de lui montrer ma tristesse, qui ne manquera pas de ressortir alors.

L’heure avance, encore et encore. Bientôt, il va être temps de partir. Pendant que MEG se prépare pour sa soirée, je charge la voiture. Ma valise disparaît dans la malle arrière. Un pincement au cœur me saisit quand je ferme le coffre : Cette fois-ci c’est sûr, je m’en vais ! Il va bien falloir que je me fasse une raison… Encore quelques minutes fugitives et il est seize heures. L’heure est venue de s’en aller. MEG paraît : Elle est très belle, sa veste lui va à merveille. J’ai du mal à croire que c’est la même femme avec qui j’ai passé une semaine sur la route. Est-ce elle qui jouait à la petite fille, se mettant à chanter en pleine rue et à faire des caprices (pour rire seulement) ? Si les clients dont elle s’occupe l’avaient vu alors, sans doute se seraient-ils inquiétés pour leurs capitaux ! Maintenant, devant moi, elle s’est transformée en une élégante femme d’affaire. Mais, malgré tout, elle ne peut empêcher ses yeux malicieux de rire…

Je monte dans la voiture. Je ferme la portière. MEG démarre : C’est fini, je m’en vais ! Direction Dorval. Comme par compassion avec moi, le ciel commence à lâcher quelques gouttes de pluie. Les nuages se rassemblent pour me souhaiter un dernier au revoir. Le soleil, lui, est parti m’attendre au-dessus de Marseille. La voiture s’arrête devant l’aérogare. Je descends prendre un chariot et j’y empile mes bagages. Je ne sais plus trop quoi faire, ni trop quoi dire. Je serre une dernière fois MEG dans mes bras et je lui dis « A bientôt... » Mes propos sont d’une telle banalité, mais rien ne pourrait exprimer réellement ce que je ressens. MEG paraît triste, elle aussi. Est-elle triste de me voir partir, ou triste de me voir triste ? Qu’importe, cela me fait tout bizarre : C’est la première fois que je vois MEG triste depuis que je la connais. Les « au revoir » ne sont jamais bien gais. Une dernière embrassade, puis je regarde MEG partir vers un ailleurs différent du mien. Je suis du regard la Toyota qui s’éloigne. Mais, très vite, je me retourne et je m’engouffre dans l’aérogare. Je ne tiens pas à craquer sur le trottoir, et à laisser quelques larmes franchir la barrière fragile de mes yeux.

Je pénètre pour la dernière fois dans le hall de l’aéroport de Dorval. La foule aéroportée qui peuple le terminal sert de refuge à ma solitude. Dans ce pays aux proportions démesurées, cet aéroport est bien le seul endroit qui soit véritablement trop petit. Je ne sais pas qui a conçu ce bâtiment, mais je pense qu’il n’avait pas prévu qu’il puisse accueillir autant de personnes en même temps. Il me faut me battre pour accéder au comptoir d’enregistrement du vol Sabena SN 582 à destination de Bruxelles. Je suis très en avance, je peux donc enregistrer rapidement mes bagages, et choisir ma place dans l’avion selon mes désirs. La zone d’enregistrement est comme une oasis de calme au milieu du tumulte. C’est aussi le coup de grâce infligé à mes rêves de Québec. Ma valise s’éloigne sur le tapis roulant, en direction de la soute à bagage d’un avion maudit, partant pour Marseille. Je me réinsère dans la foule, décidant de profiter des minutes qui me sont accordées pour visiter l’aéroport et pour, si possible, m’acheter quelques bouquins pour meubler le temps. Je me fraye un passage à travers les voyageurs. Que cette aérogare est ridiculement petite ! Je ne sais pas si c’est parce que je pars, et que cela me met de fort mauvaise humeur, mais je déteste profondément cet endroit. Les files d’attentes devant les portes d’embarquement me barrent le passage, je dois me faire tout petit avec mon sac pour me faufiler entre deux touristes en partance pour Chicago. Le hall ressemble plus à une rue commerçante de la ville souterraine qu’à un véritable aéroport international. Finalement, je déniche ce qu’il me faut dans la librairie et je m’en vais, tristement, vers mon avion qui va décoller d’ici à deux petites heures.

La porte d’embarquement est très éloignée du poste de contrôle douanier. Après avoir franchi ce dernier contrôle, je m’engage tristement dans les dédales de l’aéroport. Je me retrouve seul, sur le tapis roulant qui traverse un immense couloir vide. Au mur, un grand dessin, évoquant ce Québec que je quitte, accompagne l’incessant ballet du tapis. Tout à coup, sans que je puisse rien y faire, les larmes se mettent à couler, soulageant mon cœur, mon âme. Je n’essaie même pas de les retenir : Il est des peines qu’il vaut mieux laisser s’exprimer. Il est des peines qu’il est préférable de consoler avec modération. Je me sens stupide, et sans doute le suis-je. Je dois avoir l’air ridicule, debout, mon sac sur l’épaule, les yeux embués des larmes que je verse sur quatorze jours de bonheur.

RETOUR :

Je vais m’asseoir à l’écart des autres voyageurs et j’attends. Je n’ai plus que cela à faire de toutes façons. Dehors, la nuit s’installe et la pluie se remet à tomber. Tout se conjugue pour accentuer ma tristesse. Les premiers râleurs se font entendre. Ils sont français, bien évidemment. Ils sont pressés d’embarquer ! Quelle ineptie. Moi, cela ne me gêne absolument pas de patienter encore. J’ai l’impression ainsi de m’accorder un ultime sursis. Mais, au bout du compte, je suis bien obligé de suivre le mouvement, et me voici installé dans l’appareil. Je fixe, au dehors, le mot « Montréal » qui brille au fronton de l’aéroport. Encore quelques minutes et l’avion se met à bouger. Il prend place sur la piste et lâche toute la puissance de ses réacteurs. Je me crispe sur mon siège, attendant avec appréhension l’instant du décollage. Puis ça y est ! Les roues quittent le sol ; il est exactement vingt heures et quatre minutes. Je viens de passer, en tout et pour tout, quatorze jours, deux heures et trente six minutes sur le sol du Québec.

La dernière vision que m’offre cette belle province est superbe. Montréal est sous mes pieds, illuminée de milliers d’étoiles terrestres. Des lumières s’entremêlent pour former un halo brillant où bat le cœur de Montréal, où bat encore un morceau du mien. Le voyage de retour ne doit durer que six heures et trente minutes. Je mets le casque sur les oreilles : Le film est exclusivement en anglais, je n’ai pas le courage de tenter de le comprendre. Je passe donc tout le trajet à écouter de la musique. Je n’arrive pas à dormir. J’ai bien trop d’efforts à faire sur moi-même pour ne pas pleurer. Je ne peux pas me laisser aller, me décontracter. Je suis trop énervé, trop stressé, trop déprimé pour m’assoupir. Je voudrais me révolter à la fois contre tant d’indifférence et contre tant d’injustice. Tant d’indifférence dans cet avion où tout le monde semble content. Content de rentrer chez soi, pour les européens, et content de partir en vacances pour les québécois. Je voudrais leur crier ma douleur, la souffrance que me cause cet arrachement. Quelqu’un pourrait-il m’aider à calmer mes maux ? Tant d’injustice aussi, lors de ce départ que je ne voulais pas. Suis-je donc obligé de vivre ailleurs que dans le pays de mes rêves ? Je crois avoir mérité, pour une fois, un peu de bonheur. Avoir mérité de prendre ma part de bien–être en ce monde. Me calmer, il faut que je me calme ! A mon excitation succède trop souvent la résignation. Cette fois-ci, je dois me battre pour parvenir enfin à mon nouvel objectif : Changer ma vie, en faire quelque chose dont je puisse être fier. Je pars aujourd’hui mais, bientôt, demain, je reviendrais, rein n’est plus certain ! Pour l’heure, dans ma tête tous mes souvenirs commencent déjà à se bousculer. Je pense à MEG qui va me manquer, je le sais. Je pense à tous ces gens que j’ai rencontré et que j’ai tant apprécié. Je pense à ce pays qui me plaît et vers lequel je reviendrai un jour je le sais, un jour, qui sait ?

Il est huit heures vingt cinq lorsque l’avion se pose, me ramenant en Europe. A peine le temps de débarquer, de traverser l’aéroport bruxellois et de m’asseoir quelques minutes, qu’il est déjà l’heure de repartir. L’Avroliner s’envole, moi je profite de ce dernier transfert pour prendre une heure de sommeil, la seule de cette nuit là. Le ciel, de toutes façons, est couvert et ne permet pas d’apercevoir la Terre. Je me réveille peu avant midi. Les nuages disparaissent brusquement : On vient de passer les collines entourant l’étang de Berre. Le soleil brille généreusement. L’avion s’en va faire un détour au-dessus de Marseille. La lumière est superbe, fantastique. Marseille est bien plus jolie vue du ciel, sous le soleil, que vue du sol. Le bleu profond de la Méditerranée contraste fortement avec la blancheur des falaises et des collines ainsi qu’avec le vert des pinèdes. Notre-Dame de la Garde me salue et me souhaite la bienvenue. Puis, l’avion amorce sa descente, ralentit, se pose enfin, freine et s’immobilise sur la piste. Je suis arrivé !