UN MAUDIT FRANCAIS AU QUEBEC
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LA
BELLE PROVINCE
MARIGNANE :
Il est onze heures quarante. Ma valise est partie depuis plus dune heure et moi jattends depuis ce temps là dans laérogare, porte vingt-quatre. Lavion doit partir à douze heures dix. Je tourne en rond, le temps nen finit pas de ralentir son cours. Je vais faire un tour dans la boutique de produits détaxés, cest dire à quel point je mennuie ! Va-t-elle donc arriver lheure du décollage ? Lavion de la Sabena va atterrir bientôt jespère. Il vient dailleurs darriver en provenance de Bruxelles et libère son flot de passagers. Un flot bien relatif car lappareil nest pas très grand. Finalement voilà lhôtesse qui annonce que lembarquement peut débuter. Je pénètre dans lavion, un petit Avroliner, et je cherche ma place à côté du hublot. A première vue, le nombre de place ne dépasse guère les quatre-vingt, quatre-vingt dix peut-être, pas plus. La plupart de mes compagnons de voyage sont eux aussi en partance pour Montréal ou pour les Etats-Unis. En effet, laéroport de Bruxelles est une gigantesque plaque tournante, où se retrouvent les passagers venant de tous les coins de France et dEurope, à destination du continent nord-américain. Avec à peine cinq minutes de retard sur lhoraire prévu, lavion prend son élan et senvole dans le ciel, un peu gris, de ce samedi de septembre.
Le décor de ma chère Provence se révèle à nouveau à moi. Que la Provence est belle vue du ciel, comme dailleurs la presque totalité de la Terre. Quelques secondes après le décollage de Marignane je peux apercevoir, de manière fugitive, ma maison située non loin des pistes. Le temps pour moi de dire un dernier au revoir à ma terre bien-aimée, un au revoir sans arrière goût de regret : Je suis bien trop content de men aller enfin vers MEG. Sous moi se déroule le tapis multicolore de la Provence et de la vallée du Rhône. Peu à peu on parvient aux alentours de Lyon, avec une vue imprenable sur le Massif Central. Mais, bientôt, les nuages prennent la possession exclusive du ciel. Une possession que, jusque là, ils avaient accepté de céder par endroits. La mer de coton remplie lhorizon. Il ne me reste plus quà essayer de somnoler un peu pour passer le temps ou de lire les magazines, en anglais, que je trouve dans la pochette du siège. Le reste du vol se déroule sans incident et sans heurt, lavion reprenant contact avec le sol aux alentours de treize heures vingt-cinq.
BRUXELLES :
Cela fait des années que je ne me suis pas retrouvé à létranger, et cest en tous cas la première fois que je my trouve seul. Daccord, je nai pas besoin de sortir de la zone de transit et ma vision de la Belgique restera somme toute très limitée, mais jai quitté la France ; Et je me trouve sur le dernier palier avant que de changer de continent : La porte des Amériques souvre devant moi. Je me dirige assez aisément dans cet immense aéroport où il doit être facile de se perdre. Déjà lors de latterrissage javais pu me rendre compte de la taille de laéroport au nombre davions stationnés sur les parkings. Heureusement, les informations directionnelles sont claires et accessibles rapidement, ce qui fait que je me retrouve vite devant le lieu dembarquement. Le décollage initialement, prévu à quinze heures trente, sera finalement repoussé dune demi-heure à cause dun « surbooking », mais, bon, ce sont les aléas du transport aérien.
Sans le faire exprès, je me trouve être le tout premier à prendre place à bord. Je minstalle tranquillement et je me prépare à endurer la partie la plus pénible de mes quinze jours de vacances : La traversée est-ouest de lAtlantique. Sept heures vingt-cinq de vol, monotones et épuisantes avant darriver au but ultime. Je me retrouve au milieu dun groupe de belges flamands ne parlant pas un mot de français ou presque, au moins je ne serais pas dérangé par les bavardages de mes voisins : Cest déjà ça. Quelques minutes dattente encore, puis les réacteurs se déchaînent, laccélération me repousse contre le siège, quelques secondes de roulage et notre oiseau de fer senvole pour un beau voyage. Sur les écrans vidéo installés à bord, je vois le parcours sinscrire au fur et à mesure de notre progression, accompagné des données de vol concernant la vitesse, laltitude et la distance restante, entre autres.
Cest long, long, long Malgré les efforts déployés pour nous faire passer le temps, celui-ci sécoule à la vitesse dun escargot paresseux. Heureusement que les différents repas et collations, ainsi que le film, occupent lesprit, sinon latmosphère deviendrait rapidement tendue à bord. Lhomme nest vraiment pas fait pour être enfermé, surtout sil nest pas maître de son destin. Seule la musique me sauve de la dépression, elle nest pas mauvaise du tout et plutôt rock, ce qui nest pas pour me déplaire, bien au contraire. Mais, au bout de sept heures, je commence à me lasser de certains morceaux que jai déjà entendus deux ou trois fois. Par bonheur, le petit avion sur lécran me dit que lon vient de franchir les côtes du Canada, et que lon traverse la Nouvelle-Ecosse en direction du Québec. Cette nouvelle me réjouit le cur malgré les turbulences qui ont, elles, plutôt tendance à le secouer un peu trop. Il ne faudrait pas que le vol séternise ou je vais être vraiment malade.
Jai réglé ma montre à lheure locale, six heures en moins par rapport à la France, et un rapide coup dil mapprend quil est dix-sept heures. On ne doit plus être très loin maintenant. La lumière rouge sallume : Il faut attacher nos ceintures, lappareil amorce la descente. Brusquement, débouchant de la couche de nuages qui recouvre Montréal, lavion sort au-dessus du Saint-Laurent, limmense Saint-Laurent. Ca y est : Je suis au Québec. Mon cur semballe et mon corps endormi par de longues heures à rester assis trouve une nouvelle vigueur. La phase datterrissage est assez longue et mouvementée, mais, doucement, on se rapproche de la piste de Dorval. Et puis, enfin, je peux libérer mes émotions. Il est exactement dix-sept heures et vingt-six minutes, les roues du MD11 viennent à linstant de toucher le sol québécois !
Là, tout près, se trouve MEG qui, je lespère, mattend. Là, tout près, tout autour de moi, sétend un pays qui a peuplé tant et tant de mes rêves. Québec me voilà : Je vais mabreuver de toi jusquà ce que ma mémoire saturée me demande grâce. Je veux tout voir de tes beautés, que tu offres, comme une femme impudique offre ses charmes aux yeux des passants lubriques. Je veux effeuiller tes feuilles dérables pour voir les dessous affriolants de tes forêts magiques. Je veux semer des milliers de fleurs de lys dans mon cur inculte.
Il ne me reste plus quà franchir les dernières barrières me séparant de MEG, et ma grande, belle, fabuleuse, aventure québécoise pourra commencer.
ARRIVEE :
Me voilà donc à Montréal. Voilà le Québec ! Lhospitalité québécoise nest pas un vain mot, tout dans les couloirs de laérogare na été que sourire et mots de bienvenue. Finalement, le plus long est bel et bien le passage de la douane. Encore une heure dattente dans le hall de laéroport : Voilà bien de quoi exacerber limpatience et exaspérer les plus placides. Mais, bon, limportant cest quand même de mettre le pied pour la première fois sur le territoire canadien. Et, sil faut en passer par quelques formalités supplémentaires, ce nest somme toute pas très grave. Enfin, la douane passée (le douanier sympathique fermant les yeux sur quelques décilitres dalcools dépassant la quantité légale dimportation), une dernière épreuve reste à surmonter : Lattente interminable des valises ! Dire que je suis arrivé, que celle qui doit maccueillir et que je me languis de retrouver est là, à quelques dizaines de mètres, que je pourrais presque la voir à travers les vitres fumées, et devoir malgré tout attendre dinsupportables minutes encore, avant daller la trouver, attendre que cette satanée valise, qui nen finit pas de se faire désirer, apparaisse sur le tapis roulant : Cela finit dachever mes nerfs déjà bien fatigués. Et puis, la délivrance ! La valise débouche sur le carrousel. Je me munis dun chariot (heureusement nombreux), jy pose ma valise et mon sac, puis je franchis la dernière barrière douanière et je sors enfin dans le hall darrivée.
Et là, assaillis de toutes parts par des centaines de visages inconnus, saoulé des cris de joies des retrouvailles, je mefforce à mon tour de croiser le regard de quelquun que je connais. De longues secondes dhésitations, de doutes (Est-elle arrivé à temps ? Est-elle au courant du retard de lavion ?), et puis le bonheur !
Je tai reconnu MEG. Javais peur que les années taient changé et maient fait oublier ton visage. Mais rien de tout cela ne sest produit. Tu étais toi, telle que je tavais quitté quatre ans auparavant, le quinze juillet 1994. Tu mes apparue toujours aussi belle et toujours aussi souriante. Je tai retrouvé comme si je tavais quitté la veille, comme si rien ne sétait produit entre ton séjour en France et ma venue à Montréal. Je tai suivi jusquà ta voiture et jai commencé à te parler, moi qui dordinaire suis plutôt introverti, je me suis mis à discuter avec toi comme avant. Je me suis toujours senti bien avec toi. Je ne sais pas pourquoi, mais cest ainsi. Je ny peux rien ! Nous étions de nouveau ensemble, et à ce moment là rien ne pouvait me faire plus plaisir. Jétais bien, jétais heureux. Heureux dêtre au Québec, heureux dêtre avec toi !
Quelle surprise pour moi que Montréal ! Enfin, non, pas vraiment une surprise car je my attendais un peu, quelle découverte plutôt. Un peu moins de huit heures davion, moins de temps quil nen faut pour traverser la France en train, et me voici plongé au cur de lAmérique. Mais une Amérique faite pour et par lhomme, une Amérique à visage humain. Montréal : Une grande ville, avec son centre ville très américain, gratte-ciel et tours de verres. LAmérique, celle des rêves et des films, celle de nos lieux communs à nous européens. Et, partout autour de ce centre daffaire, une ville toute simple avec ses petits immeubles et ses maisons de briques rouges sagement alignées. LAmérique des pionniers ou presque. Bientôt nous arrivons à lappartement de MEG. Il est une heure du matin, heure de France, pourtant je ne me sens pas encore fatigué. Sans doute cela est dû au fait que je suis excité par mes retrouvailles avec MEG. Jouvre ma valise et offre les quelques présent que je lui ai amené. Elle apprécie beaucoup les petits sacs de lavandes bien odorantes et, surtout, la boîte de calissons qui va faire les délices de ses moments de gourmandise. Finalement, après presque quatre heures passées à parler et à se montrer des photographies, nous décidons daller nous coucher, parce quil le faut bien : Mais un peu à contre cur malgré tout. Demain dimanche va être une journée chargée, même si jai demandé à MEG de ne pas me « tuer » dès le premier jour.
LE MONT SAINT-HILAIRE
:
La nuit fut courte. Je me lève avant le jour vers six heures du matin. Je suis au Québec, MEG est là tout près, jai un peu de mal à réaliser que cela est vrai. Encore quelques dizaines de minutes puis MEG se réveille à son tour. Me voici emporter dans un tourbillon. Pas le temps dassimiler ce satané décalage horaire et je me retrouve emporté par la frénétique ardeur de ma québécoise préférée. Deux de ses amis nous attendent pour partir en balade avec nous. Lun deux est un français lui aussi, de Mulhouse je crois. Lui a la chance de vivre à Montréal, je sais quil est même en train de se renseigner sur les modalités pour devenir résident canadien. Je lenvie un peu et jespère pouvoir faire un jour comme lui Nous embarquons tous en direction du mont Saint-Hilaire situé à quelques kilomètres seulement de Montréal. Le mont Saint-Hilaire est lun des lieux de promenade favoris des montréalais, lendroit le plus fréquenté lors de la saison des pommes. Nous arrivons au pied du mont et nous empruntons les sentiers fléchés vers lun des points-de-vue donnant sur Montréal. Il faudra que je revienne ici en hiver, jai vu au passage, sur le chalet du parking, que des expéditions de nuit en raquettes étaient organisées lhiver. Ce doit être une expérience à vivre.
Après environ trois quarts dheure de marche nous parvenons au belvédère : Vue plongeante sur la plaine avec, dans le fond, Montréal la belle. Premiers aperçus des paysages infinis de cette somptueuse province. Une grande ville perdue dans limmensité sauvage. Des tours de béton, des rues sentrecroisant remplies de camions, de voitures et de bus. Une ville avec ses banlieues industrielles, ses banlieues commerciales, ses banlieues dortoirs et ses banlieues résidentielles. Une ville moderne avec tout ce qui fait ce que lon appelle la civilisation, en résumé. Et pourtant, aux frontières de cette ville, la nature, encore presque entièrement sauvage, surgit et reprend ses droits. Cest beau et impressionnant. Lhomme sest imposé à grands coups de béton et à force de persévérance, en taillant des routes à travers la forêt et en bâtissant des villes là où il paraissait impossible de sétablir ! Malgré tout, cet homme conquérant se doit de garder une grande humilité. On se sent tout petit ici, en dehors de labri rassurant des villes. On nest plus maîtres mais seulement dhumbles hôtes de cette nature parfois hostile. Ma première vision des paysages québécois est réellement saisissante ! Mais, déjà, il nous faut redescendre et abandonner notre poste dobservation. Je me sens tout à coup envahi dun étrange malaise. Je pense que tout ceci est dû au décalage horaire, et à une brusque lassitude qui métreint. Toujours est-il que je ne parviens absolument pas à me convaincre quil est seulement quinze heures. Je regarde plusieurs fois ma montre à quelques minutes dintervalle, mais les aiguilles me disent à chaque fois la même chose : Que les minutes ont bien soixante secondes, ici aussi. Mon corps pourtant me dit, lui, quil serait temps daller dormir. Le seul inconvénient à tout cela, cest que la journée est loin dêtre finie. Je vais avoir du mal, je le sens, à tenir le coup jusquà la fin de la soirée.
Heureusement que le voyage de retour me laisse le temps de récupérer un peu. La conversation, à laquelle je nai pas la force de participer très activement, est animée. Les deux québécoises chatouillant lorgueil français à propos des propretés respectives des villes du Québec et de France. Je dois avouer que, venant du sud de la France, je suis obligé dadmettre quelles ont en grande partie raison. Même si elles exagèrent un petit peu. Les villes françaises, du sud tout au moins, sont sales, je suis daccord, mais ce ne sont tout de même pas des décharges : Il y a des limites ! Je conçois cependant que cela puisse choquer des gens habitués à des rues propres et nettes. Larrivée à Montréal met fin, finalement, à cette discussion sur le point de virer à la dispute. Chacun se quitte en restant, comme toujours dans ces cas là, sur ses positions.
MEG mentraîne alors chez ses parents où nous attends toute la famille : Cest à dire son père, sa mère, sa grand-mère, sa sur, son beau-frère, et son neveu adoré. Je me rappelle cette soirée comme de la plus mouvementée de mon séjour. Elle na vraiment pas été triste, croyez-moi ! La maison est grande, splendide, cest une maison où il doit faire bon vivre. Toute la famille est extrêmement gentille, la grand-mère, notamment, est dune vitalité exceptionnelle. Avant que nous mangions, MEG ma fait visiter la maison, puis ma montré le carnet de voyage quelle a réalisé après sa venue en France, chez moi. Puis on a dîné dans une atmosphère de grande joie. Je ne sais pas si la famille de MEG est représentative des québécois en général, mais jai eu limpression dune grande gaieté et dune très bonne entente entre tous. Je dois avouer que lorsque MEG, sa mère et sa sur se mettaient à faire semblant de se disputer, quand elles parlaient toutes à la fois, jai quelques fois été complètement perdu ! Je ne comprenais plus rien à ce quelles se disaient, et mon esprit fatigué, pas encore habitué à laccent québécois, déclarait forfait. Heureusement que le père de MEG, est venu parfois à mon secours en me jetant des regards amusés. Je me suis senti vraiment bien accueilli et bien à mon aise. Cela ne faisait quun jour que jétais arrivé, et déjà je me sentais un peu chez moi. Moi qui suis dordinaire très timide, qui met toujours beaucoup de temps pour mintégrer dans un groupe, quel quil soit, je me voyais devenir nettement plus communicatif que dhabitude, joubliais mes coutumières inhibitions. Comme dirait MEG, je me suis lâché. Déjà je savais que javais eu raison de venir au Québec et que ce pays possédait quelque chose de plus, quelque chose de particulier pour faire de lui un endroit unique au monde.
Comme je commençais vraiment à mendormir, MEG, qui elle aussi était assez fatiguée, a décidé de rentrer. En prévision, nous avions pour le lendemain un aller-retour à Ottawa, la capitale fédérale du Canada, située à peu moins de deux heures de Montréal, vers le sud.
OTTAWA :
Après un réveil matinal, nous nous embarquons dans la voiture en direction dOttawa. Comme partout ici, la route est droite, parfaitement rectiligne durant des kilomètres et des kilomètres. Le soleil nous accompagne tout au long de la traversée du sud du Québec, les nuages napparaissent quaprès la frontière de lOntario. La pluie commence à tomber à notre arrivée à Ottawa. Cest dommage, jaurai préféré voir le parlement du Canada baigné uniquement par le soleil, mais quimporte, je maccommoderai aisément de la pluie.
Une petite plaisanterie, un petit Joke, mest venue, histoire de faire un peu enrager les québécois, et MEG en particulier. Je lui ai tout simplement dit que la plus belle chose que jai vu au Québec Cétait Ottawa. (Pour les nuls en géographie, Ottawa cest la capitale du Canada, et cest en Ontario, pas au Québec !) Non, sérieusement, Ottawa est une ville qui a son charme. Cest une ville, certainement pas la plus belle que je connaisse, mais assez agréable à visiter. Bien évidemment je ne peux pas trop en parler parce que, en définitive, je ne connais que les abords du parlement. Le parlement en lui-même est un lieu vraiment à voir. Il est surtout impressionnant pour son immense bibliothèque qui renferme, entre autre, tous les comptes rendus des sessions parlementaires depuis la création de la confédération canadienne. La bibliothèque est aussi le seul élément à avoir survécu à lincendie qui a détruit le parlement. Le tout forme un monument tel que lAmérique peut en offrir : Imposant et inspirant le respect.
Il suffit ensuite de marcher quelques minutes le long dune rue très américaine, une rue comme lon en voit dans les films américains, avec sa cohorte de voitures, que je ne connais pas pour la plupart, et sur les trottoirs, une foule pressée et bruyante, pour parvenir, comme souvent au Canada, en un lieu dun calme quasi absolu. On parvient au bord dun canal, accompagnés seulement par le chant des oiseaux et les courses des écureuils : le calme total à quelques hectomètres de la frénésie. Le soleil est revenu et je peux goûter sereinement à ma première image de lAmérique. Souvent je vais retrouver ce calme, étrange presque, en plein cur de la ville. Souvent je retrouverai leau tranquille en plein milieu de la civilisation. Mais, il nous faut déjà repartir dans la foule pour regagner la voiture. Je me rends compte que, finalement, latmosphère dOttawa est un peu trop anglophone à mon goût (Comme certains endroits de Montréal parfois ). Surtout pour un français désirant visiter, découvrir le Québec.
Le soir donc, retour à Montréal, par cette route si étrange pour moi européen citadin. Un peu plus dune heure et demie de voyage, et seulement des fermes parsemées deçà, delà, et, parfois, surgissant brusquement à lhorizon, un petit village. A perte de vue, des champs et des forêts : Les grands espaces du Canada enfin sous mes yeux. Un premier choc des cultures Mais il y en aura dautres.
Une fois arrivée à Montréal, nous nous dépêchons pour arriver tôt chez deux autres amis de MEG. Elle a son premier cours de danse de lannée ce soir et a décidé de mabandonner lâchement. Entre nous, ceci ne me dérange guère. Je suis encore bien fatigué et jai un peu de mal à me mettre à lheure canadienne. Ces quelques minutes de repos ne vont pas être de trop, surtout que demain commence la grande aventure !
QUEBEC :
Je me sors difficilement de mes rêves, le décalage horaire se faisant toujours sentir. Je me lève et je prépare mon sac de voyage. Puis, nous voilà reparti, cette fois-ci pour une semaine de pérégrinations à travers le Québec. Enfin, une partie du Québec seulement, problème de temps oblige. On embarque dans la voiture toute neuve de MEG, je crois dailleurs que je nai pas porté chance à la Toyota Tercel de mon hôtesse, je nen dirai pas plus, MEG comprendra On part enfin sur la route de Québec.
Deux heures et demie de trajet et seulement une ville, Trois-Rivières, sur le passage. Une immense ligne droite bordée darbres et encadrée de petites montagnes : Les pistes de ski des montréalais. De temps à autre (trop souvent à mon goût), sur le bord de la route, de grands panneaux publicitaires rappellent la présence invisible certes, mais bien réelle, des êtres humains. Sur ces panneaux, encore de nouvelles raisons de me sentir dépaysé. Jai lhabitude, chez moi, en Provence, de tous ces panneaux annonçant des magasins qui vendent tous ce quil est possible de vendre, tellement lhabitude que je ne les voie même plus. Tous annoncent le prochain magasin à la prochaine rue à gauche ou tout droit à cinq minutes. Ici, au Québec, sous mes yeux, une affiche indique un magasin de meubles situé à Trente-sept kilomètres ! Autrement dit, dici à là, il ny a rien dautres, il ny a rien. De quoi donner le vertige et faire prendre conscience de manière tangible de ces infinis horizons. Il est vrai quil peut y avoir de la place dans ce merveilleux Québec. Imaginez : Un pays trois fois grand comme la France et à peu près huit fois moins dhabitants. La plupart groupés aux environs de Montréal et des rares autres grandes villes éparpillées sur cet immense territoire.
Tous les voyages effectués avec MEG à travers le Québec mont permis de parler longuement avec elle et déchanger un peu de nos cultures respectives. Des cultures très différentes et dont les différences sexpriment dabord par de petits détails : Ici on parle en heures de trajet, et pas en kilomètres ; Ici la radio est francophone et fière de ses artistes, diffusant à longueur de journée les chanteurs québécois, quelques fois français et plus rarement américains. Loccasion pour moi de découvrir des « stars » encore inconnues en Europe : France dAmour, Kévin Parent, entre autres. Loccasion aussi de me rendre compte à quel point la langue française est défendue avec force, par ces hommes et ces femmes qui ne veulent à aucun prix se laisser submerger par lAmérique toute proche. Toutes et tous unis sous un même drapeau fleurdelisé, et parlant une seule et même langue avec amour, obstination, voire acharnement. Mais, laissons là les considérations philosophiques, nous arrivons à Québec : Québec la coquette, qui garde son allure de vieille ville fortifiée rejetant larchitecture moderne à la périphérie du centre historique.
Voilà donc le lieu où tout a commencé (ou presque). Sur cette terre a été fondée véritablement la plus belle des provinces. Sur cette terre qui a abattu dès la première année limmense majorité des prétentieux pionniers qui venaient la défier. Des hommes qui voulaient imposer leur mode de vie européen, là où seules les tribus amérindiennes étaient parvenues à domestiquer le climat hostile de cette belle rebelle. Voici donc la ville où sest achevée laventure française en Amérique ! La France laissant ici ses enfants abandonnés qui ont du apprendre seuls à grandir dans ladversité, qui ont du apprendre à sunir et à être vraiment solidaires : Pour survivre tout simplement. Ces enfants ont bien grandi, ce sont nos « cousins » aujourdhui. Et nos cousins nont pas oublié les trahisons et les abandons, mais je ne crois pas quils nous en veuillent encore vraiment. Peut-être subsiste-t-il juste un léger sentiment de méfiance. Sans doute lavons nous mérité, nous autres français, si arrogants parfois.
Québec est une très jolie ville. Elle est incontestablement bien plus belle, esthétiquement parlant, que Montréal. On sent quici bat le cur du Québec ! Montréal est une ville daffaire, une ville multi-culturelle, une ville multiraciale. Québec, elle, est québécoise, définitivement et exclusivement québécoise. Ici, on parle québécois, on vit québécois, on pense québécois. Le Canada paraît parfois si loin. Le drapeau bleu et blanc à fleur de lys simpose largement. Bien sûr, Québec est une ville éminemment touristique, commercialement touristique, la seule ville fortifiée dAmérique du Nord qui attire des américains tout étonnés de découvrir un parfum dEurope si proche de chez eux. Mais cest une ville avant tout authentiquement québécoise. Québec est belle, très belle.
Nous pénétrons dans Québec par la Porte Saint-Louis et allons nous garer tout près du Parc Montmorency. Après un rapide pique-nique improvisé dans la voiture, on se dirige, sous une pluie éparse, vers le château Frontenac. Une longue montée dun escalier de bois nous amène à la porte Prescott. On entre au cur du Vieux-Québec, dans la Haute-Ville. De là, visite obligée aux Plaines dAbraham. Cest là que Montcalm perdit, un beau jour de 1759, la ville et par la même occasion la vie. La taille de lendroit me semble bizarre, je pensais que le site serait immense, et il mapparaît bien petit pour un si grand événement. La forteresse anglaise, bâtie sur lemplacement des fortifications françaises, et les tours de guet entourent ces vastes pelouses, souvenirs de lointaines batailles pour une cité qui na plus connu de guerre depuis. Je ressens une impression étrange en marchant là où sont morts tant dhommes. Cela me rappelle une visite que jai faite, lorsque jétais plus jeune, au site de la bataille de Verdun. Je retrouve un peu la même sensation troublante : Voir ces paysages paisibles, dun vert uni, et se dire que là sont morts tant et tant dhommes, cela a quelque chose de surréaliste. Nous sommes seuls sur ces plaines, la pluie semble avoir rebuté les touristes, et cest tant mieux. Devant nous le fleuve Saint-Laurent coule lentement, surveillé par les canons désormais muets. En face, sur lautre rive, la ville de Lévis nous apparaît distinctement. Le fleuve nest pas très large à la hauteur de Québec, dailleurs son nom ne vient-il des indiens Algonquin chez qui le mot « Kebec » signifie « Là où la rivière se resserre » ?
Après avoir parcouru les plaines, nous parvenons sur le bord de la falaise à la promenade des gouverneurs qui nous amène, par une longue suite descaliers en bois, à une autre promenade, absolument superbe : La promenade Dufferin. Cest une immense terrasse de bois qui conduit au château Frontenac. Le majestueux château Frontenac à larchitecture unique. On se croirait presque dans un conte de fées, plein de belles princesses tristes. Moi, à cet instant, ma princesse sappelle MEG et, elle, est loin dêtre triste. En regardant le château, je me dis que je nenvie pas ceux qui sont affectés au nettoyage des innombrables vitres de cette bâtisse constellée de fenêtres. En oubliant les touristes, je pourrai me croire revenu un siècle en arrière, avec les maisons québécoises typiques, en bois, multicolores, et, derrière, la vieille ville aux ruelles étroites bordées de maisons de pierres à un ou deux étages. La balade dans Québec est réellement agréable. Le calme des petites rues et le charme de ces anciennes demeures, créent une atmosphère reposante, apaisante.
Laprès-midi avançant, nous regagnons la voiture et nous partons à quelques kilomètres de la ville pour voir la fameuse chute Montmorency. On peut considérer la chute comme une revanche des québécois contre lOntario. En effet, la chute est plus haute que celles du Niagara (83,5 mètres), moins large, certes, mais plus haute. Et cest vrai quelle est haute ! Bien sûr, il y a un téléphérique pour accéder au sommet. Mais, MEG et moi nous nous sommes promis de faire une visite « sportive » : Nous allons donc monter à pied. Je déconseille à ceux qui sont allergiques aux escaliers dentreprendre cette essoufflante ascension ! La chute, daprès ce que jai vu sur les cartes postales, est encore plus belle lhiver, lorsque leau gèle, formant une surprenante sculpture naturelle.
En premier lieu, il nous faut passer sous la douche dembruns qui balaie le pied de la cascade, puis commencer à gravir les marches de bois détrempées pour atteindre les différents belvédères permettant dobserver la chute sous divers angles. Nous commençons par gravir les marches en courant mais, rapidement, notre rythme se ralentit. Le souffle se fait plus court : Ce doit être à cause de laltitude En haut, au niveau du sommet de la chute quenjambe un pont, de bois lui aussi, démarre un chemin bordé de pelouse qui serpente au milieu dun ancien camp militaire anglais. Une fois arrivés sur le pont, on embrasse du regard le décor immense, apparemment sans limite : Lîle dOrléans, Lévis et les forêts dérables sétendent devant nos yeux émerveillés. Il ne nous reste plus quà descendre une volée de marches pour parvenir de lautre côté de la chute et apercevoir, avec satisfaction, le chemin parcouru pour arriver là Puis nous dire quil ne nous reste plus quà redescendre tout cela ! Jai compté les marches au retour et, sauf erreur de ma part, jen ai dénombré 576 ! Ca na pas de bon sens de faire une telle escalade juste par plaisir
Nous devons dégringoler rapidement les escaliers : Un ami de MEG nous attend pour souper et il doit nous rejoindre sur le parking en bas de la chute. Heureusement, nous tenons une forme olympique. Nous prenons une nouvelle douche en passant au pied de la chute, et cest relativement « humides » que lon parvient, finalement, à lheure, à la voiture. Vous ai-je déjà dit que les québécois sont des gens merveilleux ? Nous retrouvons lami de MEG en bas et, tout de suite, je sais que je vais bien mentendre avec lui. Malgré une bonne grosse fatigue, je passe une excellente soirée. Il parle beaucoup, et MEG nest pas en reste. Tout le repas ils échangent des histoires et des anecdotes dont je ne saisis pas toujours le sens : Ma compréhension du québécois saméliore mais elle nest pas encore parfaite. La conversation dure tant et si bien que les serveurs doivent attendre impatiemment notre départ pour pouvoir enfin fermer. Finalement nous quittons les lieux, la soirée nous aura permis de dénicher un logement, relativement proche de Tadoussac, nous permettant daller voir les baleines avec une grande tranquillité desprit. Et quel logement ! Mais, jy reviendrai plus tard.
Je ne mattarderai pas trop longtemps sur notre nuit à Québec. Si ce nest quelle ma fait découvrir les résidences universitaires de luniversité Laval. Nous sommes reçus là-bas par MD, une cousine de MEG. Je ne sais pas si jai le droit de le dire ici, mais jai dormi à un étage, en principe, réservé aux filles Ce nétait pas si désagréable que cela ! (Ne soyez pas jaloux messieurs ) Même si la chambre était à peu près aussi grande que ma main, à peu près aussi grande que la sincérité dun homme politique. Cest, sans doute, ce que jai vu de moins grand au Québec, avec laéroport de Dorval. Mais, bon, on peut accepter quelques sacrifices pour un aussi beau pays, surtout en étant en si bonne et si charmante compagnie
LE QUEBEC TYPIQUE :
Au réveil, la pluie avait cessé et un beau et grand soleil accueillait nos âmes encore embrumées de sommeil. Départ rapide en direction du village de la réserve indienne, le village de Wendake, le dernier village Huron existant. Pour nous, européens, le nom de Huron évoque des tribus de guerriers sanguinaires et sauvages. Nous, européens incultes encore ignorant de lextermination qua provoqué la colonisation. Les Huron nétaient principalement que des agriculteurs, nomades et pacifiques, qui se sont alliés aux colons français pour commercer avec eux. Ils apportaient les peaux et les fourrures et nous leur avons donné en échange la guerre, les maladies infectieuses, la civilisation. De plusieurs milliers, ils ont fini à peu près trois cents survivants au bord de lextinction. Maintenant ils sont revenus un peu plus de mille, travaillant dans lartisanat pour la plupart, un artisanat local qui se retrouve écoulé en partie grâce au village.
Le village est un village reconstitué qui permet aux Huron de nous faire découvrir, et de défendre avec conviction, leurs traditions et leur mode de vie. Les Huron sont, de ce point de vue là, très proches des québécois, à une échelle différente. Les deux peuples sont obligés dêtre solidaires pour préserver leurs cultures respectives. la visite du village indien est pleine denseignement. Je découvre une manière de vivre un peu divergente de celle diffusée par les westerns américains de mon enfance. Je découvre tout au long du parcours les tentes réservées au sauna, qui était destiné à purifier les âmes, à les faire entrer en transe. Je découvre les fumoirs et les séchoirs pour la viande et le poisson, la tente du sorcier, la grande maison, abritant sous un même toit toutes les familles du village. Japprends aussi les différentes méthodes de construction des canoës, la façon délire le grand chef. Japprends à connaître la médecine indienne qui permet de guérir ou de soulager nombres de maux, de manière entièrement naturelle. Les substances utilisées sont, dailleurs, fort étudiées par les chercheurs qui en tirent certains de nos médicaments occidentaux. La visite guidée se termine par un vrai moment démotion : Notre guide chante réellement très bien. Et puis, les chants indiens sont dune beauté poignante, ils pénètrent au plus profond de nos êtres pour nous amener dans un état proche de lhypnose. Ce sont vraiment des chants fabuleux. Je crois que cet instant restera comme un des moments forts de mon voyage. MEG, elle, a brusquement lenvie de devenir Huronne en apprenant que les indiens vivaient dans une société matriarcale, où la femme était à la source de toute décision. Ce qui la séduit le plus, cest dapprendre que, chez les Huron, cétait la femme qui choisissait son mari, et, quen plus, elle avait le droit de lessayer avant de confirmer son choix Moi, personnellement, je ne vois pas ce quil y a de si différent par rapport à qui se passent partout dans notre monde occidental ! Finalement, ce sont toujours les femmes qui décident dans ce domaine, et pas nous, pauvres hommes si faibles. Les indiens avaient aussi découvert le caractère psychosomatique de certaines maladies. Par exemple, quand un homme était déprimé par le fait ne pas pouvoir avoir la femme quil désirait, alors le sorcier pouvait exiger que cette femme passe quelques temps avec le malade, pour lui permettre de retrouver un bon moral Je crois que cela convient beaucoup moins à MEG, je me demande pourquoi ? Moi, au contraire, cela me semble bien intéressant. Trêve de plaisanterie, le village des Huron est un lieu extrêmement intéressant et instructif. Pour en finir avec certains de nos préjugés qui encombrent nos esprits, cest une visite indispensable à mon avis.
Nous partons alors pour dîner (on dîne à midi au Québec), dans un fast-food typiquement québécois. MEG me fait goûter, je nai pas le choix, à la célèbre poutine, nous ne sommes pas allés chez Ashton pour rien ! Il faut que je vous explique : La poutine, ce sont des frites mélangées avec du fromage coupé en dés, le tout recouvert de sauce barbecue. Je ne peux pas dire que cela atteigne des sommets dans la gastronomie, mais, bon, ce nest pas plus mauvais quun hamburger ou un hot-dog. Et, de plus, cest un passage obligé pour qui veut se plonger véritablement dans la vie des québécois, notamment la jeunesse québécoise. Mais, heureusement quen ce qui concerne la nourriture, le Québec a bien dautres choses à offrir, à nous faire déguster.
Après ce repas cent pour cent québécois, nous reprenons la voiture dans le but de faire le tour de lîle dOrléans, une île absolument magnifique ! Sur cette île, située juste à la périphérie de Québec, et dont le tour ne fait approximativement que soixante-sept kilomètres, ne se trouvent que six villages. Chaque village, comme partout, possède son église, toutes fort belles. Les maisons y sont superbes, vraiment exceptionnellement belles. Tout ici respire le bonheur et la douceur de vivre. Si un jour jen ai loccasion, cest sur cette île que je veux venir me reposer de leffervescente activité de la ville.
Notre premier arrêt est pour une cabane à sucre quun panneau nous indique, excitant notre gourmandise, la mienne et surtout celle de MEG qui, bien sûr, connaît ce que cest et nen est que plus enthousiaste. La cabane à sucre : Un endroit magique ! Cest là que lon recueille et traite le sirop dérable, là où lon retombe rapidement en enfance au milieu de toutes ces sucreries si tentantes. Dans la grande salle, un groupe de touristes a le droit à une animation typique avec chants et danses du Québec. Nous, nous restons un peu à lécart après que ceux qui soccupent de lendroit nous aient assurés que lon pourrait goûter à la tire dérable. Que je vous explique : La tire dérable, cest tout simplement du sirop dérable que lon fait bouillir, puis on le dépose sur de la neige pour quil fige. Il ne reste plus quà lenrouler autour dun bâton pour en faire une sucette. Un bonbon au caramel en quelques sortes En mille fois meilleur ! En attendant davoir le droit de nous régaler, on prend un peu le temps de flâner. Le temps aussi de se procurer au magasin des bonbons au sirop dérable : Cent pour cent de sucre, et de bonheur. Et puis, il y a aussi le sirop dérable en cane, en bouteille quoi, que lon verse sur les gâteaux ou sur les crêpes, excellent, tout bonnement excellent ! Dans une espèce datelier attenant, un homme fait bouillir du sirop dérable en prévision de notre tire prochaine. Lodeur est fabuleuse, mon estomac se met à réclamer sa part de douceur. Je lui intime lordre de se taire et je continue ma visite. En effet, dans la cabane à sucre se trouve également un petit musée retraçant lhistoire de la récolte du sirop dérable, ainsi que lhistoire succincte des bûcherons. Les fameux bûcherons canadiens : Une véritable image dEpinal, liée aux fleuves remplis de troncs darbres. Le Québec de mes rêves denfants. Derrière les bâtiments destinés à la récolte et au commerce du sirop dérable, se trouve un petit village indien. On nous explique que cela sera une nouvelle attraction de la cabane à sucre.
Vient lheure de la tire. Je mapproche du morceau de neige artificielle en suivant MEG. Je lui fais confiance, dans le domaine de la gourmandise elle est infaillible. Je suis ses gestes et je limite scrupuleusement. Je goûte et je fonds de plaisir. Cest bon quça speut pas ! Si je ne savais pas que le sucre à haute dose me rend malade, je me resservirais encore et encore. Je suis comme un gamin, et MEG est pire que moi. Rien ne semble pouvoir larrêter. Elle est incorrigible !
Malheureusement, les meilleures choses ayant une fin, nous sommes bien obligés de quitter ces lieux de gourmandise. Nos sens sont rapidement consolés. Tout au long de la route nous apparaît le charme inégalable de cette île merveilleuse. Partout, ce ne sont que nature et beauté. Les érables sétendent à perte de vue sur le léger relief central. Les champs entourent les maisons, des maisons à la beauté vraiment rare pour des constructions dhabitations humaines. Rares sont les villes ou les villages où les maisons sont aussi agréables à contempler que le paysage. Elles semblent légères, de vraies maisons de poupées à échelle réelle. Ce sont des maisons québécoises, les vraies de vraies sont en bois blanc, surmontées dun toit rouge. Sans oublier les lucarnes sous le toit, chapeautées dun triangle de bois, rouge lui aussi. Quelles sont belles ces maisons posées sur de grandes pelouses au vert éclatant. Ici, comme partout au Québec, pas de barrières. La liberté est totale, et le regard nest pas arrêté par de revêches palissades semblant forcer les hommes à se recroqueviller dans un égoïste individualisme. La route longe la côte à nen plus finir. Mes yeux ne parviennent plus à saisir autant de splendeurs. Chaque mètre parcouru découvre de nouvelles visions que je voudrais saisir pour pouvoir men souvenir éternellement.
Nous empruntons un petit chemin qui séloigne de la route principale, et qui senfonce entre les arbres en direction du bord de mer. Nous sommes juste un peu avant lentrée de Saint-François. La route nest vraiment pas en bon état, il nous aurait fallu un 4X4. Le chemin nous amène devant de petites cabanes, de pêcheurs je pense, ou bien de chasseurs, là nest pas la question. Nous nous retrouvons à quelques encablures seulement du Saint-Laurent. Plus aucun obstacle ne vient arrêter nos regards, seul un marécage nous sépare encore du fleuve. La vue est superbe et nous offre une impression dimmensité. Face à nous le cap Tourmente dresse son extrémité forestière. Cest beau, tout simplement. Je suis sûr que les centaines, voire les milliers de touristes qui viennent chaque année sur lîle dOrléans nont pas la chance davoir accès à cette vision de rêve. En effet, la route principale passe plus loin, derrière les arbres, et il faut être avec une québécoise aventurière pour sengager sur ces petites routes que les bus évitent.
Nous repartons pour Saint-François. Un arrêt devant léglise nous donne loccasion de descendre sur la plage rocailleuse. Japproche, presque respectueusement le Saint-Laurent calme et imperturbable. Je ne résiste pas longtemps à lenvie de tremper mes mains dans leau transparente. Elle nest pas aussi froide que je ne laurai imaginé. Jai juste limpression dune fraîcheur toute douce, limpression aussi de me mêler un peu à cette terre que je commence à aimer tant. Je crois, en quelque sorte, que je me baptise une deuxième fois avec leau du Saint-Laurent. Je deviens, dans mon âme, un enfant adoptif de ce pays où mon cur trouve enfin sa vraie place sur Terre. Je crois (je suis sûr en fait), que MEG ne sest rendue compte de rien, quelle na pas réalisé la lente transformation qui samorce en moi. Je deviens de moins en moins un touriste pour passer au statut de sans-abri, de locataire à la recherche dun endroit où vivre et sinstaller pour longtemps, pour toujours peut-être Les paysages du Québec se sont fait les murs de mon hypothétique future demeure, et MEG la plus convainquante des représentantes de son Québec bien-aimé.
On finit le tour de lîle en roulant tranquillement, avec la certitude davoir la triste obligation de devoir partir bientôt. La voiture sengage sur le pont reliant lîle à Québec, nous regagnons à contrecur la civilisation. Il est bien tard déjà. Nous décidons de nous rendre directement dans la vieille ville pour nous promener encore un peu au hasard des ruelles de la ville basse, et pour chercher un restaurant québécois. MEG tient absolument à me faire découvrir les spécialités culinaires locales. Elles sont, croyez-moi, très, très consistantes. Nous nous garons donc puis nous partons déambuler dans la ville. On part du vieux port qui est certainement lendroit que jaime le moins : Trop bruyant, trop de voiture, trop banalement urbain. Nous remontons ensuite vers la cathédrale Notre Dame des Victoires, remontant la rue Dalhousie bordée de canons, prenant par endroit des allures de Monaco aux alentours du palais princier, en beaucoup plus plaisant à mon goût. Puis, en touristes que nous sommes, nous faisons le tour des magasins de la vieille ville qui ne vit dailleurs que de cela. Après avoir errés dans la ville, découvrant des trésors de charmes architecturaux, nous partons en quête dun restaurant, lestomac dans les talons, et les talons fatigués par des heures de marche. Un petit restaurant spécialisé dans la gastronomie québécoise attire notre attention. On y entre donc. MEG mimpose quasiment les plats quelle veut que je découvre. Amusé par son empressement, je me laisse faire. Pour moins de quatre-vingt francs, jai failli finir au bord de lasphyxie. Tout dabord lentrée : Une salade composée que naurait pas renié Gargantua lui-même. Puis le plat principal : Une tourtière du lac Saint-Jean. Alors la tourtière, on peut dire, en résumé, que cest une tourte avec différentes viandes qui tient particulièrement bien au corps. De plus, la portion est loin dêtre radine. Après une bonne tourtière, on peut affronter le froid lesprit tranquille : On a assez de calories pour tenir le coup un long moment. Dire quil y a encore un dessert à avaler ! Je narrive déjà pas à finir mon assiette Finalement le gâteau est servi. Il a lair bien bon, je vais trouver une petite place pour le mettre. Cest un pudding chômeur. Tout le monde connaît le pudding, nest-ce pas ? Il suffit den retirer les fruits (doù le nom de chômeur, il me semble), et de le napper ensuite, et à volonté De sirop dérable ! Mon dieu que cest excellent ! Jen salive encore. Tout cela fait un repas peut-être un peu lourd à digérer, mais vraiment inoubliable. La cuisine québécoise est sans doute moins raffinée que la cuisine française, mais putain quelle est bonne ! Il faut avoir lestomac solide, mais les papilles, elles, sont en extase. Les quelques minutes de marches nécessaires pour rejoindre la voiture sont bien utiles pour digérer ce pantagruélique repas.
Il est bientôt vingt et une heures, et on nous attend pour dormir A Chicoutimi. Deux heures et demi de voyage à travers le parc des Laurentides nous attendent pour finir cette éprouvante journée. Une des journées les plus réussies que jai vécu depuis longtemps. Une bonne journée ! Je dois avouer que je nai plus trop de souvenir du voyage vers Chicoutimi. Je men excuse encore auprès de MEG. Jaurais bien voulu lui tenir compagnie, mais le sommeil ma rattrapé, et je nai pas eu le courage de lui résister. Je peux juste me souvenir que lon a tourné un bon moment dans Chicoutimi, à la recherche dune route qui prenait un malin plaisir à se dérober à nos yeux. Heureusement, grâce au plan dun noctambule serviable, nous trouvons la maison des amis de MEG qui se proposent, avec plaisir, de nous loger pour les deux prochaines nuits. Comme partout au Québec, laccueil est impeccable, simple et chaleureux. On a beaucoup à apprendre de nos « cousins dAmérique » en matière dhospitalité, et en bien dautres domaines aussi dailleurs Le temps de faire connaissance mes hôtes, le temps de se décider sur litinéraire du lendemain, et je mendors pour une longue nuit réparatrice. Je suis fatigué et MEG lest bien plus encore car, en plus, elle a conduit pendant que moi je dormais. Jai honte... Cest pour cela que, le lendemain, le réveil est plus pénible, et plus tardif, que prévu. Ce nest pas sérieux de se lever à dix heures du matin quand on veut occuper pleinement ses vacances.
LE LAC SAINT-JEAN, VAL-JALBERT :
Dès le matin, me voilà replongé dans la vie américaine avec un petit déjeuner surprenant pour moi qui nai pas lhabitude de manger autant le matin : ufs, bacon, toasts et, surtout, beurre de peanut. Là, je dois avouer que jai du mal à avaler cela. Laprès-midi, à lheure du goûter, je ne dis pas : Le beurre de peanut, ce nest pas mauvais. Mais, cest salé, extrêmement salé, salé à lexcès. Manger cela dès le matin ? Désolé, ça a vraiment du mal à passer. Mais, bon, jai essayé.
Après ces nouvelles expérimentations culinaires, le cours de notre visite reprend. Le premier arrêt est pour le plus beau point de vue que lon puisse avoir de Chicoutimi sur le fjord du Saguenay. Encore une grosse claque pour mes sens, partout de la splendeur et de la beauté. Voilà comment bien commencer une journée, par un regard illuminé damour sur ces infinis paysages. Jai retrouvé dans la région du Saguenay, cette lumière et ces décors sauvages que lon découvre en France du côté des gorges du Verdon. La région du lac de sainte-Croix ressemble un peu à un Québec en miniature. Je pourrais dire aussi que le Québec est un pays où lon découvrirait des sites, dignes de ces fameuses gorges, à chaque détour de chemin
Nous partons ensuite en direction de Val-Jalbert, le village fantôme ! Loccasion de longer limmense (et oui, tout est grand ici) lac Saint-Jean. Par temps clair, et en prenant un peu daltitude, on peut tout juste apercevoir, parfois, les reliefs de lautre rive. Cest vous dire la taille de létendue deau en question. Je me sens tout petit en face de ce lac sans fin. Je me dis que la petite île flottant au milieu serait, peut-être, intéressante à acheter. Ce serait la certitude dêtre au calme.
Les arbres tout autour du lac sont magnifiques, ils commencent à prendre leurs couleurs dautomne. Un automne comme je nen ai jamais connu, un automne de carte postale. Moi, mes décors ne sont que des décors de plages postales, sans aucun rapport avec les saisons bien différenciées de la belle province. Ici, lautomne nest pas une saison fantôme, lautomne existe !
Larrivée au village de Val-Jalbert est assez rapide. Cest le commencement dun grand moment de rigolade. Mais, tout dabord, visitons les lieux : Ce village présente une intéressante rétrospective sur la vie des pionniers du début du siècle. Il abrite une maison qui reconstitue le mode de vie de lépoque. Tout y est réuni, de la cuisine aux chambres. Cette même maison possède un mini-musée avec une chapelle, une salle de classe où lon trouve de vieilles cartes géographiques (du début du siècle : Que le monde a changé depuis !) et une galerie de photos-portraits des anciens maires et des institutrices, toutes religieuses, comme souvent au Québec à lépoque.
Une fois finie la visite de la maison, on emprunte un bus qui nous fait découvrir le village en partie restauré. Cest à ce moment que le fou rire éclate. Le chauffeur du bus, qui commente aussi la visite, est sans doute un peu « fatigué » de la longue saison estivale touristique qui sachève. Ses plaisanteries au sujet du « village fantôme de Val-Jalbert » ne sont comprises que par les québécois présents. Jen comprends aussi la plus grande part mais, les autres français nous accompagnant, et encore peu familiarisés avec laccent québécois, semblent bel et bien perdus sur une autre planète.
Malgré les délires de notre chauffeur fou, on apprend, malgré tout, que le village a été abandonné entre les deux guerres, en 1928 je crois, lorsque lusine de pâte à papier a fermé ses portes et quil a été ensuite restauré pour conserver une part du patrimoine humain québécois. Je me crois dans un décor de western, un peu comme dans un épisode de « la petite maison dans la prairie ». Les maisons sont toutes en bois, posées sur le flanc de la colline, au milieu des arbres qui ont repris leurs droits depuis le départ des hommes, recouvrant même lancienne voie de chemin de fer.
Au-dessus du village, lancienne usine a été transformée en point central de la visite. Elle abrite le magasin de souvenir, bien entendu, le départ du téléphérique qui conduit en haut de la chute (dune hauteur de 72 mètres, elle aussi dépasse les chutes du Niagara) qui faisait fonctionner lusine, et un restaurant, bienvenu pour nos ventres affamés. Le temps davaler un hot-dog (fort bon, ma foi. Meilleur que ceux que jai lhabitude de manger.), De discuter avec la serveuse qui se félicite de la présence de touristes français qui dépensent ici pas mal dargent, et nous voilà parti pour le téléphérique.
La chute de Val-Jalbert était, à lépoque, captée dans une énorme conduite forcée pour alimenter lusine. Cette eau servait à faire tourner les turbines pour produire de lélectricité et pour faire tourner les machines fabriquant la pâte à papier. Un canal charriait les troncs jusquaux broyeuses. Leau de la rivière, grâce à la chute, servait vraiment à faire vivre le village, elle était sa richesse, sa matière première. Arrivés tout en haut de la chute, nous empruntons un sentier cheminant dans la forêt. On débouche vite sur une esplanade aménagée doù la vue est saisissante. On se croirait sur le tournage de « La rivière sans retour ». Une rivière sauvage court entre les arbres, au fond dune vallée étroite et encaissée. Elle se transforme en rapides avant de se laisser tomber tout en bas pour aller se jeter ensuite dans le lac Saint-Jean. Quelques fois, en fermant les yeux, javais rêvé de tels paysages, mais jamais je naurais pu imaginer quils auraient une telle splendeur, une telle force émotionnelle. Tout au long de son cours, la rivière à la même fougue sauvage, la même agilité, la même liberté. Je me détache du paysage, il faut bien rentrer avec le téléphérique à un moment ou à un autre. De retour en bas de la chute, nous reprenons le bus pour redescendre à la voiture. Cest le même chauffeur quà laller, toujours aussi disjoncté. Une nouvelle tranche de fou rire nous prend. De quoi garder un souvenir agréable et impérissable de notre visite au village fantôme de Val-Jalbert. Vive la Marseillaise, vive la France et vive le Québec !
Nous refaisons alors la route à lenvers, suivant de nouveau la rive du si vaste lac Saint-Jean. Il faut toujours que les québécois exagèrent. Ils auraient pu se contenter dun lac normal. Mais non, à la place il ont une véritable mer Sacré Piekouagami !
Avant de rentrer à Chicoutimi, nous faisons un petit détour par La Baie. Le point de vue, paraît-il, le plus beau sur le fjord du Saguenay à la sortie du lac Saint-Jean. Je me pose des questions au sujet de la véracité de cette affirmation en y arrivant : Une énorme usine est posée sur la rive et semble devoir rompre tout le charme de lendroit. Je dois pourtant reconnaître, encore une fois, que la vue est magnifique dès que nous laissons cette usine derrière nous. Sur lautre rive, on aperçoit limage typique du Québec : Un petit village qui pointe vers le ciel le clocher brillant de son inévitable église. Un petit village blotti contre la colline et sétendant langoureusement sur le bord de la rivière. Un village ravissant pour tout dire. Même lusine toute proche ne parvient pas à troubler lordre naturel de lendroit. Les couleurs sont splendides et la lumière saisissante : Je suis sous le charme !
Nous repartons enfin à Chicoutimi. MEG veut voir la célèbre maison blanche. La seule maison qui a résisté aux inondations catastrophiques de 1995. Le symbole de la résistance québécoise aux intempéries climatiques. Ensuite, après que MEG ait essuyé ses larmes, nous allons faire un petit tour du côté de la maison quelle occupait lorsquelle habitait ici, vingt ans auparavant. A la fin de cette journée marathon, nous rentrons finalement nous reposer. Je profite de loccasion pour zapper toute la soirée en parcourant lunivers télévisuel du Québec. Une première bonne surprise : Ici les émissions sont à lheure. Mais les coupures publicitaires sont très fréquentes. La qualité des programmes nest pas exceptionnelle : Existe-t-il un pays où la télévision est vraiment intéressante ? MEG me force juste à regarder deux des séries incontournables au Québec : « La petite vie », et « Un gars, une fille ». Elles ne sont pas si mal que cela. Il y a de quoi rire franchement.
Pendant MEG et son amie discutent entre femmes, en feuilletant des albums photos, je men vais dormir : Demain, il va y avoir une matinée chargée. Lun des points dorgue de notre périple est prévu : La croisière-safari sur le Saint-Laurent pour aller voir les baleines. Direction Tadoussac. Jespère que les cétacés seront au rendez-vous. Septembre est en principe la fin de la saison, mais il devrait en rester suffisamment.
TADOUSSAC :
Le voyage de Chicoutimi à Tadoussac est un véritable enchantement. Sur des conseils avisés, nous prenons la route longeant la rive nord de la rivière. Le trajet passe par le parc du Saguenay, superbe, surtout en cette saison automnale. Lautomne au Québec : Lune des plus belles saisons sur Terre ! Les couleurs qui commencent à sortir sont absolument sublimes, mélange de vert, de jaune et de rouge, avec des milliers de subtiles nuances. Partout ce ne sont quarbres aux feuillages chatoyants et fournis. Où que je pose mon regard, je naperçois quune forêt dense et multicolore. Soudain, au milieu de cet environnement végétal, surgissent par endroit des petits lacs, petits bouts de paradis perdus dans un jardin dEden, doù lhomme, heureusement, na pas encore été chassé. Je mimagine bien possédant un des chalets bâtis au bord des lacs, pour pouvoir my cacher de la foule citadine. Pour qui aime la tranquillité, tout en conservant un aspect pratique, cest lendroit idéal : Pas très éloigné de la route principale, mais, en même temps, plongé au cur de la forêt québécoise, un vrai rêve Je sais maintenant quun jour je reviendrai voir tout cela. Il est impossible que je ne revienne pas me perdre dans ce parc si naturel. Il est impensable que je puisse me passer de ce pays merveilleux, de ces décors apaisants et puissants à la fois. Je ne peux pas croire que je ne reverrais jamais cette province si belle, si belle, tellement belle. Jamais auparavant je navais senti une telle passion naître en moi autrement que pour une femme. Je suis tombé amoureux de ce bout de Terre. Jaime de plus en plus le Québec, vraiment ! MEG mavait dit, avant mon départ de France, quelle voulait que mon séjour soit une totale réussite, pour que je déverse des torrents de louanges sur son pays à mon retour. Elle y a déjà réussi bien au-delà de ses espérances. Non seulement je suis littéralement subjugué par la Belle Province mais, de plus, je voudrais ne pas en repartir : Tout est tellement beau ici !
Il est un peu plus de midi et le Saint-Laurent sannonce. Nous voici arrivés à Tadoussac, un village côtier tout mignon. Ici, tout a été dédié aux baleines. On leur a fait un musée et on y a développé un florissant tourisme de croisière, pour les approcher au plus près. Impossible de ne pas trouver un endroit pour réserver un billet : Le village est truffé de panneaux indiquant diverses sociétés de croisières concurrentes. On ma conseillé deffectuer le safari-photo aux cétacés à bord dun des multiples zodiacs qui se proposent à nous. Nous partons donc en quête dun billet pour affronter leau froide du Saint-Laurent Rapidement, nous trouvons exactement ce que nous recherchons. Il nous reste juste le temps de manger, avant dembarquer pour la croisière qui dure quand même trois heures : Il vaut mieux partir le ventre plein. Le repas me donne loccasion dapprécier lun des multiples desserts locaux que je ne peux mempêcher de vous présenter. Bon, daccord, il faut aimer manger sucré pour les apprécier vraiment, mais, dans ce cas, force est de reconnaître quils sont absolument excellents. Jen ai goûté plusieurs et, à chaque fois, je me suis régalé. Comment ne pas parler de la très fameuse tarte au sucre, pour commencer ? Elle vous fond dans la bouche, sans donner limpression dêtre avalée, jen mangerai sans fin. Si, en plus, on rajoute une boule de glace, de préférence à la vanille, par-dessus, on atteint les sommets du bonheur gustatif : Un vrai chef-duvre !
Je noublie pas la non moins délicieuse tarte aux bleuets (Autant vous le dire tout de suite, messieurs-dames les européens : Le bleuet est un fruit qui ne pousse que là-bas.), elle est aussi légère que la tarte au sucre, et presque aussi bonne. Il faut dire que les bleuets sont, par eux-mêmes, dexcellent petits fruits ; Mais cest préparé sous la forme de tarte quils trouvent lexpression parfaite de leur saveur. Je vous ai déjà parlé du pudding chômeur. Je ne reviendrai dessus que pour confirmer lexcellence de ce dessert mémorable. Je men voudrai, enfin, doublier les tartes aux pommes de MEG. Sinon elle va men vouloir. Elles nétaient, vraiment, pas mauvaises du tout. Nest-ce pas Marie ? La reine des McIntosh Je crois quun jour je vais ouvrir une pâtisserie québécoise dans un coin de France. Juste pour pouvoir me gaver de dessert à longueur de journée ! Je crois que je remangerai même de cette gourmandise dont jai oublié le nom. Constituée tout simplement de pâte à tarte mélangée à de la cassonade. Et oui, encore et toujours du sucre ! Quiconque aime les desserts et le sucre, se doit daller un jour au Québec, pour faire un pèlerinage gastronomique sur les traces de Cartier. Tiens, cest une idée à développer ca ! Le seul inconvénient, et il est de taille (cest le cas de le dire), cest que ce régime nest pas forcément idéal pour garder la ligne Il entretiendrait plutôt les courbes, les miennes surtout.
Laissons là ces considérations caloriques et partons rejoindre les quais, car lheure approche. Nous avons quand même encore un peu de temps devant nous. Nous prenons un petit moment de détente en nous promenant sur le chemin qui longe le fleuve, en faisant le tour de la pointe pour offrir une fort jolie vue sur le fjord et lembouchure du Saguenay. Une petite promenade pour digérer et attendre que le bateau accoste. Tout à coup, nous voilà prit dune intense agitation : MEG se met à chercher désespérément son billet, ce même billet quelle perdra régulièrement pendant la demi-heure précédant lembarquement Et quelle retrouvera toujours, caché dans lune ou lautre de ses poches, ou dans son sac. Enfin, le bateau arrive. Il nous faut tout dabord prendre un grand navire de plusieurs centaines de places, qui nous déposera un peu plus loin, là où nous attendent nos vedettes. Finalement, comme nous avons tous deux le mal de mer, le choix de naviguer sur un zodiac se révèle être le bon : Cela nous permettra de respirer à lair libre. Le bateau sébranle et séloigne lentement du quai, puis il accélère peu à peu. Nous voilà parti vers les rorquals et les bélugas, et aussi les phoques.
Nous débarquons sur une petite jetée où sont regroupées quelques dizaines de touristes, comme nous, et où sont amarrés quatre zodiacs dune relativement grande taille. En suivant le mouvement général, nous voici vite rendus devant un vestiaire où lon nous distribue des pantalons et des vestes de cirés, dune épaisseur conséquente, qui doivent nous permettre de résister vaillament au froid glacial qui règne sur leau. Après cela, nous nous installons sur le bateau et, rapidement, nous partons enfin vers le large. Là, je comprends pourquoi nous sommes aussi chaudement vêtus. Lair marin, conjugué à la vitesse, refroidit vite lambiance. Tout le monde se tait et essaie, tant bien que mal, de se protéger du vent, tout en admirant le paysage grandiose qui se dévoile à nos yeux. On se rapproche de la zone dobservation où sont déjà regroupés plusieurs autres navires. Il doit certainement y avoir quelque chose à voir là-bas pour que tout ce monde sy rejoigne.
En effet, cest un spectacle magique qui soffre à nos regards de citadins. Un troupeau de baleines, des rorquals communs, nous dit-on, se trouvent là ! Pas loin dune quinzaine de cétacés crachent leurs jets dans un grondement impressionnant. Le ballet dure une poignée de minutes puis, les baleines replongent et disparaissent pour une dizaine de minutes, laps de temps durant lequel on peut suivre dautres baleines, plus petites. Celles-ci ne soufflent pas. Leurs mouvements sont remplis dune grâce inimaginable au vu de leur taille. La mer est constellée de très nombreux phoques tout mignons, qui nous regardent avec étonnement. Le suspens est à son comble, le zodiac progresse lentement sur leau en guettant le retour à la surface des mammifères géants. Personne ne peut dire où vont reparaître les baleines. En dix minutes, elles ont eu largement le temps de parcourir de nombreux kilomètres, et ce dans nimporte quelle direction. Il nous faut juste faire confiance au pilote qui, par son instinct et ses réflexes, doit nous amener au plus près des cétacés. Après plusieurs tentatives, nous voici brusquement rendus en plein cur du troupeau ! Les baleines surgissent, provoquant un mouvement collectif de surprise. Elles sont là, à dix mètres à peine. Elles sont véritablement gigantesques et majestueuses. Tous, sur le bateau, nous sommes hypnotisés par ce spectacle. En voici une qui plonge et passe juste en dessous de nous. Une autre se met bord à bord avec nous, elle nous suit pendant de longues secondes. Un silence respectueux sinstalle, tout juste troublé par le bruit des appareils photos. Tout à coup, le grondement des évents reprend de plus belle : Cinq ou six baleines passent à proximité dans un roulement de tonnerre ! Les minutes coulent, puis le dos des cétacés sarrondit, indiquant leur plongée imminente. Soudain, la mer se vide et le silence revient à bord.
Deux heures et demi se sont écoulées depuis notre départ, sans que lon sen soit rendu compte. Le pilote nous propose de profiter du peu de temps quil nous reste pour aller voir de plus près lembouchure du fjord. A lunanimité, sa proposition est acceptée. Nous quittons alors, avec un peu de regret et de nostalgie, nos baleines, et nous rentrons à grande vitesse vers notre port dattache. Quelques minutes plus tard, nous entrons dans le fjord. Les falaises qui surplombent la rivière Saguenay sont impressionnantes. Une splendeur sauvage, sans nul doute un des joyaux de la nature. Le long de la falaise coule une petite cascade, haute de plusieurs dizaines de mètres. Le bateau sen approche jusquà effleurer la roche. La civilisation est juste là à seulement un kilomètre ou deux, pourtant on se croirait perdu au fin fond dune terre encore vierge. Mais, voilà quil nous faut partir : Les trois heures se terminent. Une dernière vague De froid, et le port de Tadoussac apparaît. Nous nous défaisons de nos habits de marins et nous remettons, un peu tristement, le pied sur la terre ferme. Un moment inoubliable sachève ! Impossible de venir au Québec sans aller voir les baleines. Cest vraiment un événement à ne pas manquer ! Seules les célèbres baleines bleues auront manqué à notre « tableau de chasse », mais elles sont rares, tellement rares
Notre premier objectif, une fois à terre, est de dénicher une boutique ou un bar pour nous réchauffer. Ce sera la seule et unique fois que jaurai froid au Québec. Heureusement que la chaleur dun petit bar-restaurant nous permet de récupérer rapidement quelques degrés centigrades. Nous nous remettons de ce merveilleux voyage, puis il nous faut reprendre la route, les yeux encore brillants, pour rejoindre notre lieu daccueil pour la nuit. Il nous reste à parcourir la route longeant le Saint-Laurent une heure et demi durant pour atteindre Cap-aux-Oies.
Nous empruntons tout dabord le traversier, gratuit, pour regagner la rive sud du Saguenay. Le bras de mer nest vraiment pas très grand et le voyage ne dure donc pas longtemps. Nous débarquons sur la rive sud de la rivière Saguenay qui trace une réelle démarcation entre le sud du Québec et le nord. Déjà, la croisière me semble loin. La trépidante frénésie de notre folle semaine paraît dilater le temps, faisant durer une heure autant quune journée. Cela fait une heure que nous avons débarqués à Tadoussac et déjà, mon aventure avec les baleines semble appartenir au passé.
Nous redescendons la route en suivant la côte passant par Baie-Sainte Catherine, Saint-Siméon, la Malbaie, Pointe-au-Pic et les Eboulements. Quil est agréable de voyager au milieu dun tel décor, tout simplement superbe. Le soleil darde de ses derniers timides rayons la terre québécoise. La route défile, apportant régulièrement à nos yeux émerveillés, des images sublimes. Nous sommes presque seuls sur la route, uniquement accompagnés par la forêt à gauche et le fleuve à droite.
CAP-AUX-OIES :
Nous passons, peu à peu, de la région du Saguenay à celle de Charlevoix. Autre région mais toujours la même beauté. Ce nest pas pour rien que Charlevoix est devenue officiellement Réserve mondiale de la biosphère. Statut accordé par lUNESCO, et ce pour la première fois, à une région habitée par lhomme. Le paysage est très vallonné et recouvert dune dense forêt multicolore en cette fin septembre. La partie du fleuve que nous longeons est salée, le Saint-Laurent sest mû déjà en mer mais cultive le paradoxe en restant fleuve malgré tout. Comme souvent, les villages sont presque tous rassemblés sur la rive du fleuve, dans la vallée.
Un plan nous permet de nous guider et de choisir notre route. De toutes façons, les routes ne sont pas nombreuses, et il est difficile de ségarer vraiment. Ce plan est, en fait, dessiné à même un set-de-table. Je lai conservé en souvenir, cest un vrai chef-duvre ! Impossible de se perdre avec une telle carte. Elle nous indique avec fidélité les moindres détails du parcours. Le temps de voyagement lui-même est respecté presque à la seconde près. Quatre-vingt dix minutes seulement après notre débarquement du traversier, nous arrivons devant notre « hôtel » privé. Un vrai rêve pour allergique au béton : Cest un chalet entièrement en bois, tant à lextérieur quà lintérieur. Un second chalet, tout aussi grand, lui aussi en bois, permet de loger les visiteurs de passage. A proximité se situent le garage et latelier, ainsi que la serre chauffée. Le tout également en bois. Pour compléter ce tableau idyllique, japerçois un puits et une cabane (en bois, bien sûr), sans oublier le bain chauffant pour lhiver. Cest une merveille de propriété, blottie tout contre la forêt, avec, en plus, une vue réellement imprenable sur le fleuve, à peine à cinq cent mètres en contrebas. Le drapeau québécois peut bien flotter sur le mat devant la maison, il a raison dêtre fier. Je lance une idée : si quelquun veut un jour me faire un cadeau, il peut moffrir cette maison. Je pense que je ne refuserai pas, il se peut même que je sois très content
Nous sommes reçus comme des rois en ce merveilleux palais. Il nous attendait avec impatience, et paraît sincèrement heureux de nous recevoir. Le repas quil nous a concocté est excellent : Du porc mariné dans une sauce légèrement sucrée, un vrai délice. Et en plus, il y a de la tarte au sucre au dessert. Je suis au nirvana, dautant que la chaîne stéréo diffuse de la bonne musique : Du blues de la meilleure qualité. Merci ! La digestion est facilitée par une petite promenade au bord du fleuve, dans le noir total. Lair est doux, je me sens bien. Je me sens libre. Je me sens heureux. Jai du mal à croire que jai pu vivre plus de vingt-cinq ans sans connaître ce paradis terrestre. Pour la première fois depuis bien longtemps, je me sens satisfait de vivre. Nous rentrons à la maison et là, on découvre quatre ratons laveurs sur la terrasse. Ils sont venus se nourrir des restes de notre souper. Ils ne se soucient apparemment pas de notre présence. Ici, la communion avec la nature nest pas un vain mot. Je mamuse à les observer, comme un citadin naïf, que je suis finalement, qui découvre la vie jour après jour. Je me sens bien, et je crois que MEG aussi. Cest un petit moment de calme après une semaine vécue à deux cents à lheure. Nous navons tous deux quune seule envie : Profiter du temps présent et déguster pleinement la tranquillité de ces lieux paradisiaques. Je voudrais disposer de plus de temps pour pouvoir mattarder ici. Je pense dailleurs que demain sera une journée calme, très calme ! Il se peut fort que notre programme se voit raccourci, et que lon passe une demi-journée, au moins, à se reposer dans la quiétude de Charlevoix. Je ne sais pas si mes amis de France, habitués à la ville, ses activités et sa vie trépidante, apprécieraient autant que moi set endroit magique. Mais jaimerais quils soient là pour en profiter, et partager mon bonheur. La soirée se passe agréablement. Notre hôte parle, comme dhabitude, il nous raconte des histoires, il nous fait rire. La musique est celle du film Forrest Gump, avec Tom Hanks, et elle nous replonge dans nos souvenirs musicaux des années soixante-dix. Le sommeil me gagne doucement, je me laisse aller à une lente léthargie, je suis détendu, parfaitement relaxé. Je vais alors me coucher, avant de mendormir sur le canapé. Dehors la nuit est calme, belle. Quelle journée, oh oui, quelle journée !
Le lendemain, le réveil est pénible. La veillée sest prolongée assez tard, et tout ça mêlé à la fatigue du voyage ma achevé. Le soleil brille, et jai juste le temps de mhabiller, de traverser lallée pour regagner le chalet et daller à la fenêtre pour admirer le Saint-Laurent qui coule lentement, délicatement irisé par ce soleil matinal. Bien vite, les nuages arrivent et semparent entièrement du ciel. Rapidement le ciel est gris, bas et triste. Quelques gouttes séchappent de temps à autre et humidifient le sol. Ce nest pas vraiment un temps réjouissant. MEG et moi sommes déjà un peu fatigués, et le climat ne nous donne pas tellement envie de bouger. Nous repoussons notre départ dheure en heure. Dehors il fait gris et un peu froid mais, à lintérieur, latmosphère est chaleureuse. La gaieté naturelle de mes deux compagnons me permet doublier la pluie. MEG, profitant de la musique de Grease, essaie de me faire danser du rock, ainsi que dautres rythmes exotiques. Mais, hormis u pas ou deux, elle ne réussit pas trop. En revanche, japprends à jouer au backgammon, suivant des règles quelques peu différentes des originales. MEG est forte à ce jeu là. Elle nous bat sans nous laisser la moindre chance. Et il faut que nous nous mettions à deux pour réussir, difficilement, à vaincre. Mais, cest bien normal : Quand il sagit dêtre rusées et instinctives, les femmes sont souvent les meilleures. Quand, en plus, elles ont de la chance Après notre victoire, nous partons manger dans un petit restaurant. Il se révèle, ma foi, fort bon. A la fin du repas, je nai plus faim. Jai peu dépensé et je me suis régalé : Que demander de plus ? Nous retournons ensuite au chalet. Nous y discutons encore un peu, tout en préparant nos affaires. Malheureusement, lheure avance et nous devons rentrer dans la soirée à Montréal. Quatre heures de route nous attendent, et il est bientôt dix-sept heures. La voiture se retrouve vite chargée de nos sacs et habitée par quantité de souvenirs. Finalement, nous nous décidons à partir, un peu triste de quitter ce domaine béni des dieux. On quitte notre hôte en le remerciant chaleureusement, et en se promettant de se revoir un jour. Puis nous reprenons la route en direction de Montréal, la ville où je vais passer le reste de mon séjour.
LORRAINE :
Quelques minutes après notre départ, nous nous arrêtons pour nous régaler de la vue superbe sur le fleuve et sur lîle aux Coudres. En bas se trouve le village de Baie Saint-Paul, encore un village merveilleux. Sur le fleuve, lîle aux Coudres est pareille à un immense bateau mouillé au large. Lors dun prochain voyage au Québec, il faudra que jaille my promener : Il paraît que le tour de lîle en vélo est fort agréable. Mes yeux commencent à être saturés par tant et tant de beauté. Je pense quil faut un peu de repos pour mes sens usés. Peu à peu la nuit tombe. Le paysage devient de moins en moins visible, et nous ne sommes plus accompagnés que par des silhouettes se découpant sous la Lune. La musique coule à flots dans la voiture, les éternelles cassettes de Céline Dion. Ce nest pas que je naime pas Céline Dion, mais au bout dun moment, je ne sais pas pourquoi, je craque. Même si, parfois, les chansons sont accompagnées par la douce voix de MEG, je souffre ! (Joke ! Ne men veux pas MEG, je plaisante ) Puis, au fur et à mesure que nous nous rapprochons de Montréal, les radios locales prennent le relais. Notamment les si célèbres « Cité Rock Détente » et, surtout, « CKOI » ! Toujours beaucoup de chansons québécoises, la plupart récentes, et en particulier la toute nouvelle « toune » de Kévin Parent, dont je ne vais pas tarder à acheter le disque, sur les conseils, judicieux, de MEG. Le disque est très bon, et je serais étonné quil narrive pas un jour ou lautre en France. En tous cas, ce « Fréquenter lOubli » est devenu lhymne de mon voyage. Il y a des chansons, comme cela, qui marquent de leur empreinte les périodes heureuses de notre vie. Dautres chansons sont là aussi pour me rappeler mon voyage. Notamment celle de Notre-Dame de Paris qui doit être lun des plus grands succès de ces dix dernières années au Québec. Le voyage se passe dans la bonne humeur. On se paye, de temps à autre, des crises de fou rire en reprenant en cur les chansons les plus connues (du Starmania entre autres), et en faisant étalage de nos talents respectifs dans le domaine de la chanson Oui, on samuse bien ! Heureusement toutefois que personne nest là pour nous entendre : Il y aurait de quoi souhaiter devenir sourd
Puis, nous arrivons à Montréal, ou plutôt à Lorraine, chez les parents de MEG. Nous sommes un peu tristes tout à coup. Les vacances sont finies pour MEG, et pour moi, voici la fin dune semaine extraordinaire, pleine de paysages splendides, de gens merveilleux et avec une MEG parfaite. Une bonne nuit de sommeil se révèle bien nécessaire pour retrouver notre joie. Un peu de repos pour que nos curs et nos âmes fatigués regagnent une part de leur vitalité. Cest pour cela que la journée du lendemain prévue originellement pour être chargée, se voit considérablement allégée.
Le dimanche, le soleil nous attend est semble nous reprocher notre paresse matinale. Il est vrai que la vie semble sêtre ralentie. Nous nous levons tard, surtout MEG, ce nest pas lenvie qui nous assaille aujourdhui. Un peu de nettoyage dans la voiture, quelques notes égLe père de MEGes sur le piano. Puis nous partons chercher des amies de Meg. Ensemble, nous allons participer à la cueillette des pommes.
La cueillette des pommes, les dimanches de septembre, est une des sorties familiales des montréalais. Les agriculteurs ouvrent leurs vergers, organisent parfois quelques animations, et il suffit de payer pour quelques cents un sac ou un panier, et de le remplir de pommes directement cueillies sur larbre. Cest surtout, bien sûr, loccasion de faire un tour à la campagne, et de samuser un peu au milieu des arbres. Loccasion aussi de retrouver un peu de son âme denfant, au cur des vergers. Il y a beaucoup de circulation, tout le monde semble vouloir des derniers beaux jours. Nous parvenons enfin à un verger qui nous paraît accueillant. Nous passons un peu plus dune heure au milieu des arbres, choisissant les meilleurs fruits et nous amusant surtout, profitant de ce bref instant de liberté totale, absolue.
Le soir venu, nous retournons à Montréal puis, rapidement, nous regagnons lappartement de MEG, rue Jacques Cartier. Demain lundi, MEG reprends le travail, je vais partir seul découvrir cette mystérieuse cité qui soffre à moi. Montréal mouvre ses bras, et je vais bientôt my jeter à corps perdu !
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