CONTE DE FAITS

 

Il était une fois, un pays très lointain. Un pays si lointain que personne ne sait plus comment il s’appelait. Dans ce pays se trouvait une capitale : La capitale du royaume avec le château du roi, les écuries du roi, la banque du roi abritant le trésor du roi, ainsi que la majorité des sujets du roi. Le château était immense et son donjon, parfois, disparaissait dans les nuages tant il était haut.

Dans le château du roi, un méchant roi, vivait une jolie princesse, mais méchante elle aussi. Tous les matins, de jeunes hommes charmants, mais roturiers, sortaient à l’aube de la chambre de la princesse. Et chaque jour voyait un homme différent, parfois même ils étaient plusieurs ! La princesse se nommait Zoé et s’apprêtait à devenir la reine : Une méchante reine perfide comme elle avait toujours rêvé d’être. En effet, elle était la seule et unique descendance de méchant roi.

Un beau matin, un jeune prince, fort charmant ma foi, arriva dans le royaume. Le prince s’appelait Robinson et il était beau… Mais complètement stupide. Apprenant ceci, la princesse se dit : «La bonne affaire ! Voici un étalon que je pourrai dominer et qui, de plus, me laissera gouverner selon mon bon vouloir.» Alors la princesse Zoé manœuvra habilement pour que son père, le méchant roi, invite le prince à loger au château. Le prince Robinson en fut fort surpris. Après tout ce qu’il avait entendu dire à propos du roi sanguinaire et de sa fille nymphomane, cet assaut de civilité le prenait de cours. Mais, entre nobles, n’était-ce pas la moindre des choses qu’il l’invitât en sa demeure ? Le prince se rendit donc au château.

Le repas, choisi et imaginé par la princesse, se révéla fort bon. Composé de plats à base de gingembre, corne de rhinocéros et autres aphrodisiaques. (Mais le prince ne connaissait pas les vertus de ces produits). A la fin du dîner, la princesse insistât même pour que le prince avale une petite pilule bleue car, affirma-t-elle, il avait mauvaise mine, et elle craignait pour sa santé. Le roi, lui, passa la soirée à lui expliquer comment gouverner en utilisant, à bon escient, la torture, le despotisme et la justice expéditive. Il disserta longuement sur les bienfaits du viol royal pour les femelles de son royaume.

Vers minuit, le roi décida d’aller se coucher. Il prit congé de son invité et partit vers sa chambre, accompagné par deux servantes dénudées et plantureuses. La princesse Zoé se leva alors et, sans prévenir, se jeta sur le prince Robinson cherchant à sortir le noble appareil princier de son pantalon. Surpris par une telle attitude, le prince s’écarta brusquement. «Princesse, cria-t-il ! Vous oubliez que je suis fiancé et que je ne désire point partager votre couche !» La princesse, déjà nue, en fut très en colère. Comment ! Ce godelureau, chez qui les substances aphrodisiaques faisaient apparemment effet, se refusait à elle ? Soit ! Elle accepta sa défaite en jurant quelle prendrait sa revanche.

Le lendemain, après avoir quitté les deux jeunes pages, écuyers de son père, avec qui elle s’était consolée, la princesse Zoé se rendit dans la chambre du prince. «Prince, lui déclara-t-elle, je viens de recevoir un message de votre fiancée. Elle me prie de vous dire qu’elle vous attend sur l’île de Garde, et qu’elle est prête à vous offrir sur l’heure son hymen.» Le prince, encore sous l’effet stimulant de son repas de la veille, se leva d’un bond et ordonna qu’on lui apporte une carte. L’île de Garde se trouvait à plusieurs milliers de miles de rivage, au large, dans le grand océan qui bordait le royaume. «Prenez mon bateau, dit la princesse, il est prêt à partir et de plus il est très rapide.»

Le prince courût aussitôt au navire et leva l’encre immédiatement. Parvenu en vue de l’île de Garde, le bateau, dont le bois était pourri, commença à se désagréger, et le prince dû finir à la nage sa longue traversée. Le prince Robinson parcouru l’île de long en large mais, bien entendu, ne trouva point sa fiancée. Il maudit la princesse Zoé qui l’avait ainsi berné. «Comme cela, il ne pourra vraiment pas tromper sa fiancée, triompha la méchante princesse !»

Le prince Robinson passa de longues années sur son île déserte avant qu’un bateau passant au large ne le voit et (lui faisant payer son passage en l’affectant à la plonge), le ramène sur ses terres. Il y vécut seul et triste : Sa fiancée, lasse de l’attendre, était entrée au couvent et y était morte. Il n’eut jamais d’enfant.

C’est depuis ce temps là que, lorsqu’un marin se retrouve échoué sur une île déserte, les autres marins disent alors : «Tout cela est arrivé parce que : Robinson crut Zoé !»